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Domaine public : critères du maintien des servitudes conventionnelles ?

Conseil d’État

N° 383935   
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
8ème / 3ème SSR
Mme Esther de Moustier, rapporteur
Mme Nathalie Escaut, rapporteur public
SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ, avocats

lecture du vendredi 26 février 2016

REPUBLIQUE FRANCAISE

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 2012/449 du 13 novembre 2012, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a sursis à statuer sur les conclusions du syndicat des copropriétaires de l’immeuble  » Le Mercure  » à Nice tendant à ce qu’il soit constaté l’existence d’une servitude de passage lui profitant et grevant la parcelle cadastrée LD 151 située à Nice et appartenant à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et a invité les parties à saisir la juridiction administrative de la question de la compatibilité de cette servitude de passage avec l’affectation de la dépendance de la domanialité publique qu’elle grève.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble  » Le Mercure  » a saisi le tribunal administratif de Nice de cette question préjudicielle. Par un jugement n° 1305434 du 15 juillet 2014, le tribunal administratif de Nice a jugé que la parcelle cadastrée LD 151 appartient au domaine public de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et que la servitude de passage dont se prévaut le syndicat des copropriétaires de l’immeuble  » Le Mercure  » est incompatible avec la destination de cette parcelle, affectée au service public de l’éducation.

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 25 août 2014 et 1er avril 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble  » Le Mercure  » demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) de déclarer que la servitude de passage lui bénéficiant est compatible avec la destination de la parcelle appartenant à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur affectée au service public de l’éducation ;

3°) de mettre à la charge de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code civil ;
– le code général de la propriété des personnes publiques ;
– le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes,

– les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat du syndicat des copropriétaires de l’immeuble  » Le Mercure  » et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la société région Provence-Alpes-Côte-d’Azur ;

1. Considérant qu’il résulte de l’instruction que par un acte notarié du 13 décembre 2005 la région Provence-Alpes-Côte d’Azur a acquis de la ville de Nice la parcelle cadastrée LD 151 sur laquelle est édifié un bâtiment anciennement affecté au laboratoire d’hygiène municipal que la région a réaménagé en annexe du lycée Masséna en y installant, au rez-de-chaussée, des salles d’examen et de concours et, au premier étage, des logements de fonction ; que le syndicat de copropriétaires requérant se prévaut d’une servitude de passage sur cette parcelle, qui résulterait d’une convention conclue en 1932 ; qu’il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice, saisi sur renvoi de la cour d’appel d’Aix-en- Provence d’une question préjudicielle relative à la compatibilité d’une servitude de passage avec la domanialité publique de la parcelle en litige, a estimé une telle servitude incompatible avec l’affectation de la parcelle au service public de l’éducation ;

2. Considérant qu’il résulte des principes de la domanialité publique qu’une servitude conventionnelle de droit privé constituée avant l’entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques peut être maintenue sur une parcelle appartenant au domaine public à la double condition d’avoir été consentie antérieurement à l’incorporation de cette parcelle dans le domaine public, lorsque cette incorporation est elle aussi antérieure à l’entrée en vigueur du code, et d’être compatible avec son affectation ;

3. Considérant que la servitude dont se prévaut le syndicat requérant serait, en tout état de cause, incompatible avec l’affectation de la dépendance du domaine public qu’elle grèverait au service public de l’éducation, dès lors, d’une part, que son usage risquerait de perturber le déroulement des activités pédagogiques, d’autre part, qu’elle ferait peser un risque sur la sécurité de l’établissement en rendant difficile le contrôle des flux entrants et sortants du lycée ; que le syndicat requérant n’est, par suite, pas fondé à demander l’annulation du jugement attaqué ;

4. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui n’est pas, dans le présent litige, la partie perdante ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du syndicat de copropriété  » Le Mercure  » la somme de 3 000 euros à verser à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ;

D E C I D E :
————–

Article 1er : La requête du syndicat de copropriété  » Le Mercure  » est rejetée.

Article 2 : Le syndicat de copropriété  » Le Mercure  » versera à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au syndicat de copropriété  » Le Mercure  » et à la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

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