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Expropriation : mise en oeuvre de la théorie de l’opération complexe par voie d’exception d’illégalité !

Conseil d’État 

N° 417016    
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
2ème – 7ème chambres réunies
Mme Louise Bréhier, rapporteur
M. Guillaume Odinet, rapporteur public

lecture du vendredi 12 octobre 2018

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme F…E…, Mme B…D…et M. A…C…ont demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 12 octobre 1998 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a déclaré cessibles au profit de la société Marseille Aménagement les immeubles nécessaires à la constitution de réserves foncières en vue de l’aménagement du pôle technologique de Marseille Château-Gombert. Par un jugement n° 99-1215 du 30 avril 2003, le tribunal administratif a fait droit à leur demande.

Par un arrêt n° 03MA01407 du 5 février 2007, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel de la société Marseille Aménagement, annulé ce jugement et rejeté la demande de Mmes E…et D…et de M.C….

Recours dans l’intérêt de la loi

Par un recours, enregistré le 2 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre d’Etat, ministre de l’intérieur demande au Conseil d’Etat d’annuler cet arrêt dans l’intérêt de la loi.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Louise Bréhier, auditrice,

– les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,

1. Considérant que Mmes E…et D…et M. C…ont demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 12 octobre 1998 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a déclaré cessibles au profit de la société Marseille Aménagement les immeubles nécessaires à la constitution de réserves foncières en vue de l’aménagement du pôle technologique de Marseille Château-Gombert ; que par un jugement du 30 avril 2003, le tribunal administratif a fait droit à leur demande ; que par un arrêt du 5 février 2007, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel de la société Marseille Aménagement, annulé ce jugement et rejeté la demande de Mmes E…et D…et de M. C… ; que le ministre d’Etat, ministre de l’intérieur demande l’annulation de cet arrêt dans l’intérêt de la loi ;

2. Considérant qu’aux termes du II de l’article L. 11-5 du code de l’expropriation, applicable au litige :  » L’acte déclarant l’utilité publique précise le délai pendant lequel l’expropriation devra être réalisée. (…) / Lorsque le délai accordé pour réaliser l’expropriation n’est pas supérieur à cinq ans, un acte pris dans la même forme que l’acte déclarant l’utilité publique peut, sans nouvelle enquête, proroger une fois les effets de la déclaration d’utilité publique pour une durée au plus égale. / Toute autre prorogation ne peut être prononcée que par décret en Conseil d’Etat  » ;

3. Considérant que l’arrêté de cessibilité, l’acte déclaratif d’utilité publique sur le fondement duquel il a été pris et la ou les prorogations dont cet acte a éventuellement fait l’objet constituent les éléments d’une même opération complexe ; que, dès lors, à l’appui de conclusions dirigées contre l’arrêté de cessibilité, un requérant peut utilement se prévaloir, par la voie de l’exception, de l’illégalité de la première prorogation dont l’acte déclaratif d’utilité publique a fait l’objet, y compris lorsque la légalité de la seconde prorogation n’a, pour sa part, pas été mise en cause ; qu’ainsi, en jugeant que l’illégalité de la première prorogation de la déclaration d’utilité publique était dépourvue d’incidence sur la légalité de l’arrêté de cessibilité attaqué devant elle en raison de l’intervention d’une seconde prorogation, la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit ; que, par suite, le ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, est fondé à demander l’annulation de l’arrêt contesté dans l’intérêt de la loi ;

D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt n° 03MA01407 du 5 février 2007 de la cour administrative d’appel de Marseille est annulé dans l’intérêt de la loi.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur.

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