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Impossibilité de changer le parti d’aménagement après enquête publique

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE LYON

N° 08LY01466   
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. BEZARD, président
M. Gérard FONTBONNE, rapporteur
M. BESSON, commissaire du gouvernement
SELARL HUGLO LEPAGE ET ASSOCIES CONSEIL, avocat

lecture du mardi 2 février 2010

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu, I, la requête, enregistrée le 26 juin 2008 sous le n° 08LY01466, présentée pour l’ASSOCIATION DE DEFENSE CONTRE LA ROCADE NORD-OUEST ET POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT DU NORD-OUEST DIJONNAIS (ADEROC) dont le siège est 7 allée des Frères Creux à Talant (21240) ;

L’association demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0700526 du Tribunal administratif de Dijon du 29 avril 2008 en tant qu’il n’a fait que partiellement droit à sa demande et a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de la Côte d’Or du 22 décembre 2006 autorisant l’Etat, au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement, à réaliser les travaux de construction de la rocade nord de l’agglomération dijonnaise sur le territoire des communes d’Ahuy, Daix, Dijon, Fontaine les Dijon et Plombières les Dijon ;

2°) d’annuler l’arrêté préfectoral litigieux ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
L’association soutient que son président à qualité pour agir ; que le dossier soumis à enquête publique présente de nombreuses insuffisances ; que l’enquête relève du régime défini par l’article L. 123-3 du code de l’environnement ; que les interrogations de la commission d’enquête sur 25 points revèlent l’insuffisance du dossier ; que le passage sur le site de l’ancienne décharge de la ville de Dijon est ignoré ; qu’alors que le tracé passe en zone de protection rapprochée du champ de captage des Gorgets aucune indication n’est donnée sur les prescriptions applicables ; que le risque de pollution par les sels de déneigement est minimisé ; que les estimations de trafic ne sont pas fiables ; que le canal de Bourgogne n’est pas indépendant du réseau hydrographique ; que l’impartialité du président de la commission d’enquête n’est pas assurée dès lors qu’il présidait également la commission d’enquête sur la déclaration d’utilité publique du projet ; qu’il n’est pas justifié que la commune de Dijon ait été invitée à émettre un avis ; qu’au regard de la légalité interne le projet présente un risque de pollution des eaux souterraines et de surface ; que le site s’inscrit dans un relief karstique qui génère des échanges entre eaux de surface et eaux souterraines ; qu’il existe des échanges entre le canal de Bourgogne et l’Ouche ; que le projet présente de fortes rampes constituant un facteur accidentogène aggravant le risque de renversement de camions de transport de matières dangereuses ; qu’il n’est pas démontré que les prescriptions de la mise en place d’une glissière en béton sur toute la longueur du tracé soient suffisantes ; que la pollution chronique ne sera pas correctement traitée par des bassins assurant seulement une décantation et non un traitement ; que l’impact sur les eaux souterraines des décaissements à opérer pour compenser les remblais réalisés en zone inondable n’a pas été mesuré ; que les eaux rejetées dans le milieu naturel par surverse des bassins de décantation ne peuvent pas être regardées comme s’apparentant à des eaux pluviales non polluées ; qu’il y a risque de pollution pendant les travaux ; que le projet méconnaît le principe de précaution ; que les difficultés liées au passage du tracé sur le site de l’ancienne décharge de Dijon ont été négligées ; qu’une étude, réalisée en octobre 2005, sur les risques présentés n’a pas été versée au dossier d’enquête ; que l’ouverture du sol de cette ancienne décharge génèrera des lixiviats entraînant une pollution des eaux souterraines ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 novembre 2008, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que le maître d’ouvrage n’a pas l’obligation de communiquer au public tous les documents d’études ; que le dossier d’enquête publique fournissait une information suffisante ; que les risques liés à la décharge ont été précisément analysés ; que les estimations de trafic peuvent comporter une marge d’erreur ; que le moyen tiré de l’absence de consultation de la commune de Dijon manque en fait ; que la seule circonstance que le président de la commission ait également conduit l’enquête sur la déclaration d’utilité publique ne peut permettre de le regarder comme partial ; qu’en ce qui concerne la légalité interne, le projet améliore la situation existante ; que le caractère insuffisant du dispositif prévu pour recueillir les eaux ruisselant sur la chaussée n’est pas démontré ; que des précautions seront également prises en cours de chantier ; que des précautions sont également prévues pour pallier le risque d’inondation ; que le tribunal administratif a régulièrement pu subordonner le commencement des travaux à la localisation de la zone de compensation des pertes de volume d’expansion des crues ; que le principe de précaution n’est pas méconnu ; qu’en ce qui concerne le léger empiètement sur le talus de l’ancienne décharge l’association spécule sur les risques sans élément tangible ;

Vu les pièces produites le 10 novembre 2008 par le ministre de l’écologie ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 17 février 2009, présenté par l’association requérante qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens en faisant valoir que le ministre se borne à affirmer que les travaux n’accroîtront pas les risques d’inondation ; qu’aucune étude n’a été conduite pour rechercher une zone de compensation pour l’expansion des crues ; qu’il est permis de s’interroger sur la faisabilité de cette mesure compensatoire ; que le passage du tracé sur la décharge impliquera d’extraire environ 8 000 tonnes de matériaux pollués ; qu’aucune étude géotechnique approfondie ne permet d’apprécier le risque de délestage du flux pollué vers la nappe ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 novembre 2009, présenté pour l’ASSOCIATION ADEROC qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens en faisant valoir que même en l’absence de précipitations exceptionnelles, la surverse des bassins de rétention entraine le rejet dans le milieu naturel sans aucun traitement des eaux polluées ayant ruisselé sur les chaussées ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 décembre 2009, présenté par le ministre de l’écologie qui confirme ses précédentes conclusions en faisant valoir que les bassins de rétention sont étanches ; qu’une étude est en cours pour éviter les décaissements de compensation dans le lit majeur de l’Ouche, par une solution innovante consistant à créer une surinondation en amont du site par la plantation de haies perpendiculairement au lit de la rivière ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 décembre 2009, présenté pour l’ASSOCIATION ADEROC qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens en faisant valoir que la plantation des haies est contraire au règlement du PPRI qui impose de s’abstenir de créer des obstacles à l’écoulement des eaux ; qu’aucune indication n’est donnée sur l’implantation des haies et leur entretien ; qu’il est affirmé, sans indication chiffrée, que les bassins sont dimensionnés pour une occurrence de 50 ans alors que la communauté scientifique s’accorde pour dire que le réchauffement climatique va conduire à des épisodes pluvieux de plus en plus violents ; que la canalisation en béton qui longe le lac n’a pas été dimensionnée pour être étanche ; que l’administration de l’équipement ne se préoccupe pas de la pollution du milieu naturel au-delà des exutoires ; que la dilution ne modifie pas la quantité de polluants répandue dans le milieu naturel ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 décembre 2009, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 décembre 2009, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu, II, la requête enregistrée le 30 juin 2008 sous le n° 08LY01490 présentée pour la COMMUNE DE DAIX représentée par son maire en exercice ;

La commune demande à la Cour d’annuler le jugement susvisé, d’annuler l’arrêté du préfet de la Côte d’Or du 22 décembre 2006 et de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient qu’aucun document spécifique relatif aux risques de pollutions liés au passage de l’ouvrage près de l’ancienne décharge ne figure au dossier d’enquête ; qu’une étude simplifiée n’a été achevée que le 19 décembre 2006 ; que l’avis favorable de la commission d’enquête se réfère à des éléments techniques complémentaires apportés après la clôture de l’enquête ; que le tribunal administratif a modifié l’article 6 de l’arrêté attaqué en subordonnant le remblaiement à la localisation d’une zone compensatoire d’expansion des crues ; qu’il ne pouvait pas renvoyer à des études ultérieures le soin de déterminer une des conditions essentielles d’appréciation du bien-fondé de l’autorisation ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2008, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que le mémoire communiqué le 15 septembre 2006 par le maître d’ouvrage au président de la commission d’enquête ne contenait pas d’éléments ne lui ayant pas été communiqués ; que le dossier soumis à enquête était suffisant pour informer le public ; que le document d’incidence était en relation avec l’importance des travaux projetés ; que le tribunal administratif a pu régulièrement subordonner le commencement des travaux à l’identification de la zone de compensation des remblais pour l’expansion des crues ;

Vu, III, la requête enregistrée le 3 novembre 2009 sous le n° 09LY02552 présentée pour l’ASSOCIATION ADEROC qui demande à la Cour de prononcer, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution de l’arrêté susmentionné du préfet de la Côte-d’Or du 22 décembre 2006, et de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L’association soutient que la condition d’urgence est remplie ; que le risque de pollution des eaux souterraines et de surface est élevé ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 novembre 2009, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que la réalisation de cette liaison autoroutière présente un intérêt public majeur ; qu’il est impératif qu’elle puisse être achevée dans les meilleurs délais ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 novembre 2009, présenté pour l’ASSOCIATION ADEROC qui confirme ses précédentes conclusions en faisant valoir que la surverse des bassins de rétention entraine le rejet dans le milieu naturel sans aucun traitement des eaux polluées ayant ruisselé sur les chaussées ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 décembre 2009, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 décembre 2009, présenté par le ministre de l’écologie qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 janvier 2010, présentée par le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 5 janvier 2010 :

– le rapport de M. Fontbonne, président-assesseur ;

– les observations de Me Balaÿ, avocat de l’ASSOCIATION ADEROC ;

– les observations de M. Quinet et M. Félix, représentants le Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;

– les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;
– la parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que les requêtes susvisées dirigées contre le même arrêté présentent à juger des questions communes ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Considérant que l’aménagement par l’Etat d’une liaison autoroutière de 7,5 kilomètres, dénommée liaison nord de l’agglomération dijonnaise, a été déclarée d’utilité publique par décret du 4 janvier 2006 devenu définitif ; que le projet prévoit, dans une première phase de travaux, l’établissement d’une chaussée à deux voies portée ensuite, dans une deuxième phase, à deux fois deux voies ; que l’arrêté litigieux du préfet de la Côte d’Or, en date du 22 décembre 2006, autorise les travaux d’aménagement de cette voie express au titre de la loi sur l’eau ; que, d’une part, le tracé s’inscrit dans un secteur se caractérisant par une forte sensibilité pour la protection de la ressource en eau en raison de la nature karstique des terrains traversés, créant des relations entre les écoulements souterrains et de surface, et de la présence en aval des périmètres de protection du champ de captage des Gorgets alimentant en eau potable une partie de l’agglomération dijonnaise ; que, d’autre part, le tracé comporte un passage en remblai dans le lit majeur de l’Ouche et nécessite une excavation du site de l’ancienne décharge d’ordures ménagères de Dijon ;

Considérant que le tribunal administratif a complété l’arrêté litigieux ; qu’en ce qui concerne l’assainissement des eaux de ruissellement des chaussées représentant 25 hectares, il a prescrit l’installation sur la totalité du tracé de glissières en béton armé destinées à assurer l’étanchéification de la plate-forme, ainsi que des mesures d’entretien des bassins de décantation et de surveillance de la nature des effluents ; qu’en ce qui concerne le remblaiement dans le lit majeur de l’Ouche, il a subordonné le commencement des travaux à la définition du secteur où sera réalisée la zone d’expansion des crues de compensation ;

En ce qui concerne l’établissement d’un remblai dans le lit majeur de l’Ouche :

Considérant que le projet prévoit, sur le territoire de la commune de Plombières les Dijon, le passage de l’ouvrage sur un remblai à créer dans le lit majeur de l’Ouche sur une emprise de 32 500 m2 ; que le plan de prévention des risques d’inondation (PPRI), applicable à cette commune, approuvé par arrêté préfectoral du 19 juin 2001 classe le secteur en zone d’aléa faible, mais en zone rouge inconstructible, afin de préserver le champ d’expansion des crues ; que l’article 1-2 du règlement dudit PPRI prévoit toutefois que les infrastructures de transport peuvent être autorisées, si elles ne portent pas atteinte à l’expansion des crues ;

Considérant que l’article 6 de l’arrêté litigieux prévoit que les pertes de volume d’expansion des crues liées aux travaux de remblaiement devront être intégralement compensées par la création, sur un autre secteur, d’une zone d’expansion de surface équivalente à l’emprise des remblais prévus soit 32 500 m2 ; que l’arrêté litigieux prescrit au maître d’ouvrage de réaliser, dans un délai de 24 mois, une étude pour définir ladite zone d’expansion de compensation ; que, comme il a été dit ci-dessus, l’arrêté litigieux a été complété sur ce point par le tribunal administratif qui a subordonné le commencement des travaux à la localisation de la zone d’expansion de compensation ;

Considérant que la création d’une zone d’expansion des crues en compensation de la zone soustraite par l’établissement des remblais, est, comme l’explique le ministre dans son mémoire en défense, un élément substantiel de l’autorisation de réaliser les travaux d’aménagement ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la réalisation de la zone d’expansion de compensation implique, non seulement d’identifier un terrain répondant à la condition de surface exigée, mais aussi de s’assurer de la faisabilité de l’opération sur le terrain désigné en vérifiant notamment que l’exécution des décaissements nécessaires peut être effectuée, sans affecter l’aquifère sous-jacent, ainsi privé d’une partie de sa couche protectrice ;

Considérant que le document d’incidence versé au dossier d’enquête publique, après avoir présenté, page 32, les conditions d’établissement des remblais dans le lit majeur de l’Ouche, mentionne comme mesure corrective, la création, de part et d’autre, de l’ouvrage, à proximité de son emprise de fossés de compensation de 600 m3 en première phase de travaux et 8 800 m3 en deuxième phase ;

Considérant que l’arrêté litigieux s’écarte du projet ainsi décrit en prévoyant, comme il a été dit ci-dessus, la création d’une zone de compensation sur un autre secteur ; qu’il adopte ainsi un parti d’aménagement différent de celui soumis à enquête publique en renvoyant à une étude ultérieure la détermination d’un élément substantiel du projet ; que, si le tribunal administratif a subordonné le commencement des travaux à la localisation du terrain de 32 500 m2 devant constituer la zone de compensation, il est constant que le public a été privé d’information sur un élément substantiel du projet, et de la possibilité de présenter des observations, tant sur le choix du terrain, que sur son aptitude à assurer son rôle d’expansion sans affecter l’aquifère sous-jacent par les affouillements à réaliser ; que, d’ailleurs, dans un mémoire enregistré le 14 décembre 2009, l’administration a indiqué qu’elle s’orientait vers un parti d’aménagement encore différent consistant dans la plantation de haies perpendiculairement au lit de l’Ouche, afin de créer une zone de surinondation ; que les requérants sont, par suite, fondés à soutenir que l’arrêté litigieux est intervenu à l’issue d’une procédure irrégulière, en tant qu’il autorise l’exécution des travaux d’aménagement de la section de l’ouvrage en remblai dans le lit majeur de l’Ouche ;

En ce qui concerne les travaux à réaliser sur l’emprise de l’ancienne décharge d’ordures ménagères de la ville de Dijon :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’excavation du pied du talus de la décharge, nécessaire au passage de la voie routière, qui conduira à extraire au moins 7 300 tonnes de déchets, est susceptible de compromettre la stabilité du talus et de mettre en mouvement des lixiviats, ensuite entraînés dans le relief karstique et un aquifère alimentant un point de prélèvement d’eau potable ;

Considérant, en premier lieu, que le document d’incidence établi pour la demande d’autorisation au titre de la loi sur l’eau , et versé au dossier d’enquête publique, est muet sur ce point ; que l’administration fait valoir que l’étude d’impact établie pour la demande de déclaration d’utilité publique, qui était également versée au dossier d’enquête publique, fait état du passage du tracé sur le site de l’ancienne décharge en indiquant les risques pour la ressource en eau et les mesures correctives envisagées et qu’ainsi le public a été alerté sur cette question et mis à même de présenter des observations ; que l’administration ajoute qu’une étude géotechnique, remise en octobre 2005, qu’elle n’était pas tenue de verser au dossier d’enquête publique, puis une étude remise en décembre 2006, ont conclu à la faisabilité de l’opération ;

Considérant, il est vrai, que l’administration n’est pas tenue de verser au dossier d’enquête, toutes les études réalisées pour la conception d’un projet ; qu’il est vrai également que l’étude d’impact préalable à la déclaration d’utilité publique fait mention, page 81, du passage du tracé sur le site de l’ancienne décharge dans une rubrique d’un tableau énumérant les différents impacts de l’ouvrage ; que, toutefois, même si le public pouvait être alerté sur cette question par une recherche dans l’étude d’impact produite en annexe, l’absence dans le document d’incidence, document spécifique pour la demande d’autorisation au titre de la loi sur l’eau, de toute analyse des risques présentés et des mesures envisagées pour les conjurer, tant dans le résumé non technique que dans le corps de l’étude, a été de nature à fausser l’information du public, même si des observations ont néanmoins été présentées sur ce point ;

Considérant, en second lieu, que la première étude géotechnique remise en octobre 2005, et intitulée Etude simplifiée des risques , si elle conclut à la faisabilité de l’opération, conclut aussi à la nécessité de sondages et études complémentaires relatives aux conditions d’exécution des terrassements et à un traitement spécifique des écoulements de lixiviats ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’étude, remise en décembre 2006, dont l’administration indique avoir disposé à la date du 21 décembre 2006 de signature de l’arrêté litigieux, concluerait, en définitive, à l’absence de tout risque de pollution de l’aquifère et en conséquence à l’absence de contraintes particulières à respecter ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l’arrêté litigieux est entaché d’illégalité en ce qu’il autorise, sans comporter de prescriptions particulières, l’exécution des travaux d’aménagement de l’ouvrage sur le site de l’ancienne décharge de la ville de Dijon ;

En ce qui concerne le rejet dans le canal de Bourgogne des eaux de surverse du bassin de décantation n°1 :

Considérant que l’arrêté litigieux prévoit le rejet des eaux de surverse des bassins n° 2 et 3 recueillant les eaux de ruissellement des chaussées dans une canalisation ayant son exutoire dans l’Ouche en aval du champ de captage des Gorgets ; que cette canalisation n’est pas utilisée en ce qui concerne les eaux de surverse du bassin n° 1 dont l’arrêté litigieux prévoit le rejet avec un débit de fuite de 50 l/s dans le canal de Bourgogne en amont du champ de captage ; que le document d’incidence, après avoir relevé que la canal de Bourgogne intervient dans l’alimentation de la nappe alluviale de l’Ouche, indique, sans apporter aucune précision à l’appui de cette affirmation que, pour la section concernée, le canal est colmaté et les échanges avec la nappe inexistants ; qu’à supposer même cette affirmation vérifiée, et alors que les eaux de surverse ayant seulement subi une décantation et non un traitement, ne peuvent pas être regardées comme s’apparentant à des eaux pluviales, aucune précision n’est davantage donnée sur les effets d’accumulation des polluants dans le milieu quasi-fermé du canal ; que, par suite, alors même que ce déversement ne concerne qu’une section de chaussée de 400 mètres, les requérants sont fondés à soutenir que le dossier soumis à l’enquête publique n’a pas délivré au public une information suffisante ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les requérants sont, au regard des illégalités susmentionnées qui affectent l’économie générale de l’autorisation délivrée par l’arrêté litigieux, fondés à en demander l’annulation dans sa totalité, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens présentés ; qu’il y a lieu d’annuler le jugement attaqué et l’arrêté du préfet de la Côte-d’Or du 22 décembre 2006 ;

Sur les conclusions à fin de suspension :

Considérant qu’à la suite de l’annulation ci-dessus prononcée les conclusions de l’ASSOCIATION ADEROC à fin de suspension de l’exécution de l’arrêté litigieux, sont devenues sans objet ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant qu’il y a lieu sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 3 000 euros à l’ASSOCIATION ADEROC et d’une somme de 1 200 euros à la COMMUNE DE DAIX ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 29 avril 2008 est annulé.
Article 2 : L’arrêté du préfet de la Côte d’Or du 22 décembre 2006 est annulé.
Article 3 : Il n’y a pas lieu de statuer sur la requête n° 09LY02552 de l’ASSOCIATION ADEROC à fin de suspension de l’exécution de l’arrêté du préfet de la Côte-d’Or du 22 décembre 2006.
Article 4 : Sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, l’Etat versera une somme de 3 000 euros à l’association ADEROC et une somme de 1 200 euros à la COMMUNE DE DAIX.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l’ASSOCIATION DE DEFENSE CONTRE LA ROCADE NORD-OUEST ET POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT DU NORD-OUEST DIJONNAIS (ADEROC), à la COMMUNE DE DAIX et au ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer.
Délibéré après l’audience du 5 janvier 2010 à laquelle siégeaient :
M. Bézard, président de chambre,
M.Fontbonne, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 février 2010.

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