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La constructibilité d’un terrain ne dépend pas de son appartenance à une ZAC

Juridiction: Cour de cassation
Formation: Chambre civile 3
Date de la décision: jeudi 28 avril 2011
N°: 10-16034
Publié au bulletin
Solution: Cassation
Titrages et résumés: EXPROPRIATION POUR CAUSE D’UTILITÉ PUBLIQUE – Indemnité – Immeuble – Terrain – Terrain à bâtir – Qualification – Conditions – Détermination

URBANISME – Zone d’aménagement concerté – Expropriation pour cause d’utilité publique – Indemnité – Immeuble – Situation juridique de l’immeuble – Zone de situation – Définition – Portée

La création d’une zone d’aménagement concerté n’ayant pas pour effet à elle seule de rendre constructibles les parcelles du secteur qu’elle concerne, une cour d’appel ne donne pas de base légale à sa décision en déduisant le caractère constructible d’une parcelle expropriée de sa seule intégration à une telle zone

Président: M. Lacabarats
Rapporteur: M. Cachelot
Avocat général: M. Laurent-Atthalin
Avocats en présence: Me de Nervo, SCP Defrenois et Levis

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l’article L. 13-15, du code de l’expropriation, ensemble les articles R. 311-5 et R. 311-6 du code de l’urbanisme ;

Attendu que pour fixer les indemnités dues à Mme Viviane X… et à Mme Y…, veuve X…, à la suite de l’expropriation au profit de l’Etablissement public d’aménagement du Mantois Seine aval (EPAMSA) d’une parcelle leur appartenant, située dans une zone d’aménagement concerté (ZAC) créée par arrêté préfectoral du 28 décembre 2006, l’arrêt attaqué (Versailles, 26 janvier 2010) retient que cette parcelle qui est aujourd’hui constructible du fait de son intégration dans le périmètre de la ZAC l’était déjà le 23 mai 2006, un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique du 6 novembre 2007, qu’il résulte du procès-verbal de transport du 6 mars 2009 qu’elle est desservie par un chemin carrossable et que, selon les informations émanant des Domaines, elle est équipée d’un réseau d’eau potable, d’un réseau d’assainissement public et d’un réseau électrique à basse tension ;

Qu’en déduisant ainsi le caractère constructible de la parcelle expropriée de sa seule intégration dans une ZAC, alors que la création d’une telle zone n’a pas pour effet, à elle seule, de désigner comme constructible le secteur qu’elle concerne, et en n’indiquant pas si le chemin desservant la parcelle ainsi que les divers réseaux existaient à la date de référence, la cour d’appel, qui n’a pas précisé si elle fixait l’indemnité de dépossession en fonction d’une qualification du terrain à bâtir de cette parcelle, n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 janvier 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, chambre des expropriations ;

Condamne Mmes X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mmes X…, les condamne, ensemble, à payer à l’Etablissement public d’aménagement du Mantois Seine aval la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour l’Etablissement public d’aménagement du Mantois Seine aval

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir fixé l’indemnité de dépossession du terrain en ce compris celle de remploi à la somme de 145.100 euros,

AUX MOTIFS QUE la parcelle ZK 09, constructible du fait de son intégration dans le périmètre de la ZAC, l’était déjà un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique du 6 novembre 2007 »,

ET QU’ « il résulte du procès-verbal de transport du 6 mars 2009 qu’elle est desservie par un chemin qui, quoique non asphalté, est néanmoins emprunté par des véhicules automobiles et dessert des garages fermés appartenant à l’ensemble immobilier ; que dès lors, le premier juge ne pouvait, sans se contredire, qualifier ce chemin de non carrossable, ce qui impliquait que les voitures ne pouvaient y circuler, tout en mentionnant que «les riverains locataires de l’ensemble appartenant à l’OPIEVOY peuvent accéder à des garages par cette voie» ; que la nature de cette desserte, à l’évidence couramment empruntée, rend manifeste que la voie donnant accès au terrain est adaptée à l’approche du matériel de lutte contre l’incendie ; que ce terrain trapézoïdal d’une superficie de 2.620 m2 s’étend sur 36 mètres le long du chemin qui selon les éléments d’information émanant des Domaines est équipé d’un réseau public d’eau potable (diamètre 100 mm), d’un réseau d’assainissement public de type pseudoséparatif (d’un diamètre de 300 mm pour EP et de 200 mm pour EU) et d’un réseau électrique basse tension ; que cette parcelle se trouve dans un environnement qui a perdu toute vocation agricole faisant fasse à un ensemble d’immeubles en bon état d’entretien extérieur et aux garages de ceux-ci, se situe à proximité de l’autoroute A 13, d’un important centre commercial, d’un ensemble de pavillons et d’une zone constructible ; que les consorts X… fournissent des références relatives à des terrains à bâtir situés à BUCHELAY respectivement de 750 m2 d’un prix de 160 euros par m2 et de 1.496 m2 d’un prix de 110 euros par m2 ; que compte tenu essentiellement des dimensions plus importantes de leur bien et de sa localisation dans une zone où comme l’avait fait observer le commissaire du gouvernement le 16 février 2009, une parcelle quant à elle beaucoup plus grande de 8.852 m2 a été vendue le 30 décembre 2008 au prix de 24,405 euros par m2, il convient de retenir le concernant une valeur de 50 euros par m2 ; que dès lors l’indemnité principale s’établit pour une superficie non contestée de 2.620 m2 à 131.000 euros ; que l’indemnité de remploi est de 14.100 euros »

1°/ ALORS QUE la qualification de terrain à bâtir est réservée aux terrains qui, un avant l’ouverture de l’enquête prévue à l’article L.11-1 ou, dans le cas visé à l’article L.11-3 du code de l’expropriation, un an avant la déclaration d’utilité publique, remplissent les conditions cumulatives de l’article L.13-15 II du code de l’expropriation ; que l’arrêt attaqué a fixé le montant de l’indemnité sans préciser la date d’appréciation du caractère de terrain à bâtir; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article L.13-15 II du code de l’expropriation,

2°/ ALORS QUE SUBSIDIAIREMENT (les branches suivantes étant subsidiaires par rapport à la première) la création d’une zone d’aménagement concerté n’a pas pour effet immédiat de désigner comme constructible le secteur qu’elle concerne ; qu’en déduisant le caractère constructible de la parcelle expropriée de sa seule intégration dans une ZAC, la cour d’appel a violé les articles R 311-5 et 311-6 du code de l’urbanisme, ensemble l’article L.13-15-II du code de l’expropriation,

3°/ ALORS QUE en affirmant que la parcelle ZK 09 était constructible un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique du 6 novembre 2007 sans rechercher, comme elle y était cependant invitée, si au regard des règles d’urbanisme alors applicables interdisant toute construction, la parcelle litigieuse était constructible, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.13-15 II du code de l’expropriation,

4°/ ALORS QUE la qualification de terrain à bâtir est réservée aux terrains qui, un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique sont effectivement desservis par une voie d’accès, un réseau électrique, un réseau d’eau potable et, dans la mesure où les règles relatives à l’urbanisme et à la santé publique l’exigent pour construire sur ces terrains, un réseau d’assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains ; que lorsqu’il s’agit de terrains situés dans une zone désignée par un plan d’occupation des sols rendu public ou approuvé comme devant faire l’objet d’une opération d’aménagement d’ensemble, la dimension de ces réseaux est appréciée au regard de l’ensemble de la zone ; qu’en statuant comme elle a fait sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si les réseaux existants étaient compatibles avec l’ensemble du projet, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.13-15 II du code de l’expropriation,

5°/ ALORS QUE en considérant qu’il résultait de l’avis des domaines que la parcelle litigieuse comportait un système de réseau viable alors que l’avis des domaines du 10 mai 2007, seul applicable, au contraire de celui du 31 janvier 2008, concluait à l’absence de réseau viable, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 13-15 II du code de l’expropriation,

6°/ ALORS QUE en considérant qu’il résultait de l’avis des domaines du 31 janvier 2008 que la parcelle litigieuse comportait un système de réseau viable sans rechercher si ces équipements existaient déjà un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 13-15 II du code de l’expropriation,

7°/ ALORS QUE en se référant aux constatations faites dans le procès-verbal de transport sur les lieux du 6 mars 2009 sans vérifier que les éléments constatés existaient d’ores et déjà un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 13-15 II du code de l’expropriation.

Décision attaquée: Cour d’appel de Versailles du mardi 26 janvier 2010

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