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R.600-1 CU : notification envoyée à une mauvaise adresse mais quand même retirée, c’est bon !

Cour Administrative d’Appel de Marseille

N° 15MA00027   
Inédit au recueil Lebon
9ème chambre – formation à 3
M. PORTAIL, président
M. Jean-Marie ARGOUD, rapporteur
M. ROUX, rapporteur public
TAOUMI, avocat

lecture du vendredi 1 juillet 2016

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une demande enregistrée sous le n° 1301360, M. F… D…a demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler l’arrêté du 30 juin 2008, par lequel le maire de la commune de Goudargues a délivré un permis de construire à M. G… pour la réalisation d’un  » abri jardin « .

Par une demande enregistrée sous le n° 1401250, M. F… D…, M. et Mme A…D…, ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler l’arrêté du 4 février 2014 par lequel le maire de la commune de Goudargues a délivré un permis de construire modificatif à M. G… pour la réalisation de travaux sur une construction initialement autorisée par le permis de construire délivré le 30 juin 2008.

Par un jugement n° 1301360, 1401250 du 6 novembre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a joint ces affaires et a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, des pièces et un mémoire complémentaire, enregistrés le 6 janvier 2015, le 14 janvier 2015 et le 17 février 2016, M. F… D…, M. et Mme A…D…, représentés par Me C…, demandent à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 novembre 2014 ;

2°) d’annuler l’arrêté de permis de construire du 30 juin 2008 et l’arrêté de permis de construire modificatif du 4 février 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Goudargues une somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :
S’agissant de la recevabilité de leur demande devant le tribunal administratif :
– ils ont intérêt à demander l’annulation des permis de construire attaqués ;
– leurs demandes de première instance ne sont pas tardives ;
– ils justifient de l’accomplissement des formalités prévues par l’article R. 600-1 du code de justice administrative ;
– l’exception de l’autorité attachée au jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 novembre 2010, ayant rejeté la demande de M. et Mme A… et Marie-Laure D…n’est pas fondée ;

S’agissant de la légalité des permis de construire attaqués :
– le dossier de demande du permis de construire initial ne comporte aucun élément permettant d’apprécier l’insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et comporte des photographies ne permettant pas de situer le terrain dans son environnement lointain, en méconnaissance des alinéas b), c) et d) de l’article R. 431-10 du code de l’urbanisme ;
– le permis de construire a été obtenu par fraude car il concerne non un abri de jardin mais une maisonnette destinée à la location ;
– la construction projetée ne pouvait pas légalement être autorisée sans le dépôt d’un permis de construire de régularisation, portant sur la construction existant sur le terrain, qui n’a pas été, elle-même, légalement autorisée ;
– le projet n’est pas raccordé à un dispositif de traitement et d’évacuation des eaux usées, en méconnaissance de l’article NC4 du plan d’occupation des sols.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 juin 2015 et 29 février 2016, la commune de Goudargues, représentée par la SCP Margall-d’Albenas conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d’une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– les moyens invoqués par M. F… D…à l’encontre du permis de construire du 30 juin 2008 méconnaissent l’autorité attachée à la chose jugée par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 novembre 2010 ;
– la demande de M. F… D…est tardive ;
– les formalités de notification prévues par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme qui n’ont pas été effectuées à l’adresse en Allemagne du pétitionnaire, telle qu’elle est mentionnée sur le permis de construire sont irrégulières ;
– les moyens soulevés par M. D… ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 juin 2015 et 23 mars 2016, M. E… G…, représenté par la SCP Coudurier et Chamsky, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d’une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
– les formalités de notification prévues par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme n’ayant pas été respectés en appel, l’appel n’est pas recevable ;
– les demandes de première instance méconnaissent l’autorité attachée à la chose jugée par le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 novembre 2010 ;
– les demandeurs ne justifient pas d’un intérêt suffisant pour agir à l’encontre des permis de construire attaqués, au regard des exigences de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme ;
– la demande de M. et Mme D… du 21 mai 2013 est tardive.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné M. Portail en application de l’article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendu au cours de l’audience publique.
– le rapport de M. Argoud,
– les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
– et les observations de Me C… représentant les requérants et celles de Me J… représentant la commune de Goudargues.

1. Considérant que, par un arrêté de permis de construire du 30 juin 2008 délivré à M. G… concernant un  » abri jardin « , le maire de la commune de Goudargues a autorisé l’édification d’une construction en pierre de 20 mètres carrés de surface de plancher comportant une terrasse couverte de 20 mètres carrés ; que par un arrêté de permis de construire modificatif du 4 février 2014, délivré à M. G…, le maire de la commune de Goudargues a autorisé la modification d’une fenêtre et de la toiture du projet autorisé le 30 juin 2008, ainsi que la création d’un barbecue intérieur ; que M. et Mme A… et Marie-Laure D…ont demandé l’annulation de l’arrêté de permis de construire du 30 juin 2008, par une demande qui a été rejetée par un jugement n° 0902488 du tribunal administratif du 26 novembre 2010, confirmé par une ordonnance de la cour administrative de Marseille n° 11MA00478 du 17 mars 2011 ; que sous le n° 1301360, M. F… D…a demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler l’arrêté de permis de construire du 30 juin 2008 ; que sous le n° 1401250 M. F… D…, M. et Mme A… et Marie-LaureD…, ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler le permis de construire modificatif du 4 février 2014 ; que le tribunal a joint ces demandes et les a rejeté par un même jugement ; que par une même requête M. F… D…et M. et Mme A… et Marie-Laure D…relèvent appel de ce jugement ; que, d’une part, M. F… D…doit être regardé comme demandant à l’annulation du jugement en tant qu’il a rejeté ses conclusions présentées contre le permis de construire initial qui ont été enregistrées sous le n° 13012390 et l’annulation de l’arrêté du 30 juin 2008 et, d’autre part, M. F… D…et M. et Mme A… et Marie-Laure D…doivent être regardés comme demandant l’annulation du jugement en tant qu’il a rejeté leurs conclusions présentées contre le permis de construire modificatif qui ont été enregistrées sous le n° 1401250 et l’annulation de l’arrêté du 4 février 2014 ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance de M. F… D…dirigée contre le permis de construire délivré le 30 juin 2008 :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme :  » Le délai de recours contentieux à l’encontre d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R. 424-15.  » ; qu’aux termes de l’article R. 424-15 du même code :  » Mention du permis explicite ou tacite (…) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l’arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite (…) est acquis et pendant toute la durée du chantier (…) / Cet affichage mentionne également l’obligation, prévue à peine d’irrecevabilité par l’article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou contentieux à l’auteur de la décision et au bénéficiaire du permis (…)  » ;

3. Considérant qu’il résulte des pièces du dossier, et en particulier de l’attestation établie le 8 octobre 2009 par M. B… H…, propriétaire d’une résidence secondaire à Goudargues, que le panneau d’affichage du permis de construire a été déplacé le 16 mai 2009 en front de rue, de manière à être visible de tout passant ; que M. H… atteste également que le 21 mai 2009, suite à une conversation téléphonique avec M .G…, il a complété le panneau d’affichage du permis de construire avec l’indication de la surface du terrain, de la surface hors oeuvre et de la surface hors oeuvre nette autorisés par le permis de construire, ainsi que de la hauteur de la construction ; qu’il atteste enfin que le 8 octobre 2009, le panneau d’affichage est toujours en place ; que les consorts D…n’apportent aucun élément de nature à remettre en cause la sincérité de cette attestation ; que si l’affichage comporte une erreur, en mentionnant que la date du permis de construire est le 9 juin 2008 alors qu’il a été délivré le 30 juin 2008, cette erreur, dans les circonstance de l’espèce, n’est pas de nature à vicier la régularité de l’affichage, dès lors que les autres indications permettaient aux tiers d’identifier le permis et que la consultation de ce dernier n’en a pas été rendue de ce fait plus difficile ; que le délai de recours contre le permis de construire en litige était dès lors expiré quand, par une demande enregistrée le 21 mai 2013 devant le tribunal administratif de Nîmes, M. F… D…a demandé l’annulation dudit permis de construire ;

Sur la recevabilité de l’appel de M. F… D…et M. et Mme A… et Marie-Laure D…à l’encontre du jugement en tant qu’il a rejeté leurs conclusions présentées contre le permis de construire modificatif qui ont été enregistrées sous le n° 1401250 :

4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme :  » En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un certificat d’urbanisme, d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant un certificat d’urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d’aménager ou de démolir. L’auteur d’un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d’irrecevabilité du recours contentieux qu’il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours./ La notification du recours à l’auteur de la décision et, s’il y a lieu, au titulaire de l’autorisation est réputée accomplie à la date d’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux.  » ;

5. Considérant qu’il résulte des termes mêmes de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, dont le but est d’alerter tant l’auteur d’une décision d’urbanisme que son bénéficiaire de l’existence d’un recours contentieux formé contre cette décision, dès son introduction, que cette formalité peut être regardée comme régulièrement accomplie dès lors que la notification est faite au titulaire de l’autorisation désigné par l’acte attaqué, à l’adresse qui y est mentionnée ; qu’en revanche lorsque cette notification est accomplie à une autre adresse, elle ne peut être regardée comme étant régulièrement accomplie que s’il est établi que son destinataire a effectivement réceptionné le pli ;

6. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, d’une part, la notification du recours contentieux effectué par les consorts D…n’a pas été effectuée à l’adresse mentionnée par l’autorisation d’urbanisme attaquée ; que, d’autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment des allégations de M. G… qui ne sont pas contestées sur ce point, que la lettre de notification, qui a été envoyée à l’adresse du terrain d’assiette du projet n’a pas été réceptionnée par le destinataire ; que dans ces conditions, les formalités de notification prévues par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme ne peuvent pas être regardées comme ayant été régulièrement effectuées ; que le pétitionnaire est donc fondé à soutenir que la requête d’appel est irrecevable ; qu’elle doit donc être rejetée pour ce motif ;

7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les consorts D…ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes ;

En ce qui concerne l’appel du jugement relativement à la demande n° 1401250 :

8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une quelconque somme soit mise sur leur fondement à la charge de la commune de Goudargues, qui n’a pas la qualité de partie perdante, au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu, sur le même fondement, de mettre à la charge des requérants une quelconque somme au titre des frais exposés, chacun par la commune et par M. G… et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. F… D…et de M. et Mme A… D…est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Goudargues et par M. G… sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F… D…, à M. A… D…, à Mme I… D…, à M. E… G…et à la commune de Goudargues.

Délibéré après l’audience du 17 juin 2016, où siégeaient :

– M. Portail, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l’article R. 222-26 du code de justice administrative,
– Mme Busidan, premier conseiller,
– M. Argoud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er juillet 2016.

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