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Zones d’assainissement : quelle est la procédure de délimitation ?

Conseil d’État

N° 364720   
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
6ème / 1ère SSR
Mme Clémence Olsina, rapporteur
Mme Suzanne Von Coester, rapporteur public
SCP COUTARD, MUNIER-APAIRE ; SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET, avocats

lecture du vendredi 17 octobre 2014

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 décembre 2012 et 20 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye, dont le siège est 24, rue du Général Leclerc, mairie de Lamorlaye, à Lamorlaye (60260), représentée par sa présidente, pour Mme A…B…, demeurant … et pour M. D…C…, demeurant … ; l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye et autres demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt n° 11DA01754 du 25 octobre 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Douai a, sur la requête de la commune de Lamorlaye, d’une part, annulé le jugement du tribunal administratif d’Amiens n° 0903116 du 20 septembre 2011 en tant qu’il annule la délibération du conseil municipal de Lamorlaye du 29 mai 2009 approuvant le plan de zonage d’assainissement de la commune, et, d’autre part, rejeté leur demande tendant à l’annulation de cette délibération ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de la commune de Lamorlaye ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lamorlaye la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Clémence Olsina, auditeur,

– les conclusions de Mme Suzanne Von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat de l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye, de Mme B… et de M.C…, et à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la commune de Lamorlaye ;

1. Considérant que le désistement de Mme B…et de M. C…est pur et simple ; que rien ne s’oppose à ce qu’il en soit donné acte ;

2. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Lamorlaye (Oise), qui abrite une population de 9 000 habitants sur une superficie d’environ 15 km², est composée d’un bourg densément construit, doté d’un système d’assainissement collectif, ainsi que d’un secteur boisé au bâti plus épars, dit  » Domaine du Lys « , regroupant environ 40% de la population de la commune et doté d’un système d’assainissement non collectif ; que le conseil municipal de la commune de Lamorlaye a, après une enquête publique, qui s’est déroulée du 2 mars au 3 avril 2009, approuvé, par une délibération du 29 mai 2009, un nouveau plan de zonage d’assainissement retenant un système d’assainissement collectif pour l’ensemble de la commune, notamment pour le  » Domaine du Lys « , ayant vocation à s’étendre à 300 habitations situées sur le territoire limitrophe de la commune de Gouvieux ; qu’à la demande de l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye et autres, le tribunal administratif d’Amiens a annulé cette délibération par un jugement du 20 septembre 2011 ; que cette association se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 25 octobre 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Douai a, sur appel de la commune de Lamorlaye, annulé ce jugement et rejeté ses conclusions de première instance ;

3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales, dans sa version alors applicable :  » Les communes ou leurs établissements publics de coopération délimitent, après enquête publique : / 1° Les zones d’assainissement collectif où elles sont tenues d’assurer la collecte des eaux usées domestiques et le stockage, l’épuration et le rejet ou la réutilisation de l’ensemble des eaux collectées ; / 2° Les zones relevant de l’assainissement non collectif où elles sont tenues d’assurer le contrôle de ces installations et, si elles le décident, le traitement des matières de vidange et, à la demande des propriétaires, l’entretien et les travaux de réalisation et de réhabilitation des installations d’assainissement non collectif (…)  » ; qu’aux termes de l’article R. 2224-6 du même code :  » (…) on entend par : / – » agglomération d’assainissement  » une zone dans laquelle la population et les activités économiques sont suffisamment concentrées pour qu’il soit possible de collecter les eaux usées pour les acheminer vers une station d’épuration ou un point de rejet final ; / –  » charge brute de pollution organique  » le poids d’oxygène correspondant à la demande biochimique en oxygène sur cinq jours (DBO5) calculé sur la base de la charge journalière moyenne de la semaine au cours de laquelle est produite la plus forte charge de substances polluantes dans l’année (…)  » ; qu’aux termes de l’article R. 2224-7 du même code :  » Peuvent être placées en zones d’assainissement non collectif les parties du territoire d’une commune dans lesquelles l’installation d’un système de collecte des eaux usées ne se justifie pas, soit parce qu’elle ne présente pas d’intérêt pour l’environnement et la salubrité publique, soit parce que son coût serait excessif  » ; qu’aux termes de l’article R. 2224-8 du même code, dans sa version alors applicable :  » L’enquête publique préalable à la délimitation des zones mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 2224-10 est conduite par le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent, dans les formes prévues par les articles R. 123-6 à R. 123-23 du code de l’environnement  » ; qu’aux termes de l’article R. 2224-9 du même code :  » Le dossier soumis à l’enquête comprend un projet de délimitation des zones d’assainissement de la commune, faisant apparaître les agglomérations d’assainissement comprises dans le périmètre du zonage, ainsi qu’une notice justifiant le zonage envisagé  » ; qu’aux termes de l’article R. 2224-10 du même code :  » Les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans une agglomération d’assainissement dont les populations et les activités économiques produisent des eaux usées dont la charge brute de pollution organique est supérieure à 120 kg par jour doivent être équipées, pour la partie concernée de leur territoire, d’un système de collecte des eaux usées. (…)  » ; qu’aux termes de l’article R. 2224-19 du même code :  » Tout service public d’assainissement, quel que soit son mode d’exploitation, donne lieu à la perception de redevances d’assainissement établies dans les conditions fixées par les articles R. 2224-19-1 à R. 2224-19-11  » ;

4. Considérant, d’une part, qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient aux communes, ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents, qui disposent sur ce point d’un large pouvoir d’appréciation, de délimiter les zones d’assainissement collectif et d’assainissement non collectif en tenant compte de la concentration de la population et des activités économiques productrices d’eaux usées sur leur territoire, de la charge brute de pollution organique présente dans les eaux usées, ainsi que des coûts respectifs des systèmes d’assainissement collectif et non collectif et de leurs effets sur l’environnement et la salubrité publique ; qu’en vertu de l’article R. 2224-10 du code général des collectivités territoriales cité ci-dessus, lorsque tout ou partie du territoire d’une commune est compris dans une agglomération d’assainissement, au sens de l’article R. 2224-6 du même code, dont les populations et les activités économiques produisent des eaux usées dont la charge brute de pollution organique est supérieure à 120 kg par jour, la commune est tenue d’équiper cette partie du territoire d’un système de collecte des eaux usées ;

5. Considérant, d’autre part, qu’il appartient au maire ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent de conduire l’enquête publique préalable à l’adoption de cette délimitation, dans les conditions fixées par les dispositions des articles R. 2224-8 et R. 2224-9 du code général des collectivités territoriales citées ci-dessus ; que la méconnaissance de ces dispositions n’est de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l’illégalité de la décision prise à l’issue de l’enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l’information de l’ensemble des personnes intéressées par l’opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l’enquête et, par suite, sur la délibération adoptée par la collectivité compétente ;

6. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le dossier d’enquête publique comparait plusieurs scénarios de zonage d’assainissement, notamment un scénario 2, prévoyant l’extension du système d’assainissement collectif à l’ensemble du territoire de la commune, y compris au  » Domaine du Lys « , à un scénario 3, prévoyant le raccordement au système d’assainissement collectif d’une partie seulement des habitations du  » Domaine du Lys  » ; que le dossier d’enquête publique recommandait l’adoption du scénario 2 au motif, notamment, qu’il était moins onéreux que le scénario 3, alors que les évaluations financières jointes au dossier faisaient apparaître que le scénario 3, d’un coût de 15 606 340 euros, était moins onéreux que le scénario 2, évalué à 22 512 940 euros ; qu’en jugeant que ces contradictions, portant sur l’un des critères présidant au choix d’un système d’assainissement, n’avaient pas nui à l’information de l’ensemble des personnes intéressées, et que, dès lors, la procédure d’enquête publique n’était pas entachée d’irrégularité, la cour a dénaturé les pièces du dossier ;

7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’association requérante est fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Lamorlaye la somme de 3 000 euros à verser à l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : Il est donné acte du désistement du pourvoi de Mme A…B…et de M. D…C….

Article 2 : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Douai du 25 octobre 2012 est annulé.

Article 3 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Douai.

Article 4 : La commune de Lamorlaye versera une somme de 3 000 euros à l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à l’association cadre de vie et environnement de Lamorlaye, à Mme A…B…, à M. D…C…et à la commune de Lamorlaye.

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