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Permis de construire : en référé, pas de sursis à statuer pour régulariser !

Conseil d’État

N° 385183   
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
6ème / 1ère SSR
M. Jean-Baptiste de Froment, rapporteur
M. Xavier De Lesquen, rapporteur public
SCP SPINOSI, SUREAU, avocats

lecture du vendredi 22 mai 2015

REPUBLIQUE FRANCAISEAU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Le préfet de la Haute-Corse a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bastia, statuant sur le fondement de l’article L. 554-1 du code de justice administrative, de suspendre l’exécution de l’arrêté du 25 avril 2014 par lequel le maire de la commune de Furiani a délivré un permis de construire à la SCI Paolina en vue de réaliser un immeuble d’une surface de plancher de 3 890 m2 sur des parcelles cadastrées B 2320 et B 2319. Par une ordonnance n° 1400730 du 24 septembre 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a fait droit à sa demande.

Par un mémoire enregistré le 10 octobre 2014 au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille, la SCI Paolina a demandé l’annulation de cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bastia.

Par une ordonnance n° 14MA04159 du 13 octobre 2014, le président de la cour administrative d’appel de Marseille a transmis ces conclusions au Conseil d’Etat en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d’Etat le 16 octobre 2014 et le 27 janvier 2015, la SCI Paolina demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 1400730 du 24 septembre 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Bastia ;

2°) statuant en référé, de rejeter le déféré du préfet de la Haute-Corse ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

– le code général des collectivités territoriales ;

– le code de l’urbanisme ;

– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. B…A…, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la SCI Paolina ;

1. Considérant, en premier lieu, qu’en application de l’article L. 421-2-4 du code de l’urbanisme :  » les permis de construire délivrés par le maire (…) sont exécutoires de plein droit dès lors qu’il a été procédé à leur notification et à leur transmission au représentant de l’Etat (…) / Les actes transmis sont accompagnés des dossiers et des pièces d’instruction ayant servi à leur délivrance / (…)  » ; que lorsque la transmission de l’acte au représentant de l’Etat faite en application de l’article L. 421-2-4 du code de l’urbanisme n’est pas accompagnée des documents annexes ayant servi à la délivrance du permis de construire et nécessaires pour mettre le préfet à même d’apprécier la portée et la légalité de l’acte, il appartient à ce dernier de demander à l’autorité communale, dans le délai de deux mois de la réception de l’acte transmis, de compléter cette transmission ; que dans ce cas, le délai de deux mois prévu pour le déféré préfectoral devant le tribunal administratif par l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ne court que soit de la réception des documents annexés réclamés, soit de la décision implicite ou explicite par laquelle l’autorité communale refuse de compléter la transmission initiale ;

2. Considérant qu’il ressort tant des énonciations de l’ordonnance attaquée que des pièces du dossier soumis au juge des référés que, le 16 mai 2014, le préfet de la Haute-Corse a adressé au maire de Furiani une demande tendant à ce que le dossier relatif au permis de construire délivré à la SCI Paolina soit complété, notamment, par la transmission des avis de la collectivité territoriale de Corse et du département de la Haute-Corse prévus par l’article R. 423-53 du code de l’urbanisme dès lors qu’était projetée la création d’accès sur des voies appartenant à ces collectivités ; qu’il résulte du point précédent qu’en estimant que la demande de production de ces pièces nécessaires à l’instruction du dossier de permis de construire était de nature à proroger le délai de deux mois dont le préfet disposait pour déférer le permis de construire litigieux au juge administratif, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia n’a pas commis d’erreur de droit ni entaché son ordonnance de dénaturation des pièces du dossier ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu’une partie au moins de la parcelle d’assiette du projet litigieux est située dans une des zones d’aléa fort identifiées par le plan de prévention du risque inondation ; que dès lors, eu égard à l’office que lui attribuent les articles L. 511-1 et L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés a pu, sans commettre d’erreur de droit ni entacher son ordonnance de dénaturation, retenir, en l’état de l’instruction, comme de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire litigieux le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du plan de prévention du risque inondation ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme :  » Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations  » ; que, ainsi que l’a jugé le juge des référés, même dans l’hypothèse où le moyen de nature à créer un doute sérieux est relatif à une illégalité qui serait susceptible d’être régularisée en application de ces dispositions, il n’appartient pas, eu égard à son office, au juge des référés, qui statue en urgence, de faire usage des pouvoirs conférés au juge du fond par l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et de surseoir à statuer pour permettre au bénéficiaire de régulariser l’autorisation contestée ; que, par suite, l’ordonnance attaquée n’est pas entachée d’une erreur de droit sur ce point ;

5. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SCI Paolina n’est pas fondée à demander l’annulation de l’ordonnance qu’elle attaque ; que son pourvoi doit être rejeté, y compris ses conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : Le pourvoi de la SCI Paolina est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SCI Paolina.
Copie en sera adressée pour information à la ministre du logement, de l’égalité, des territoires et de la ruralité.

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