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Zone d’Assainissement Collectif : la commune doit raccorder au réseau le terrain !

Conseil d’État 

N° 396046    
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
3ème – 8ème chambres réunies
M. Christian Fournier, rapporteur
Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public
SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP FOUSSARD, FROGER, avocats

lecture du vendredi 24 novembre 2017

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

M. A… B…a demandé au tribunal administratif d’Orléans d’annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Rigny-Ussé a rejeté sa demande tendant au raccordement de ses propriétés au réseau d’assainissement collectif ainsi que la délibération du 6 juin 2012 par laquelle le conseil municipal de cette commune a confirmé le rejet opposé à sa demande. Par un jugement n° 1201890 du 5 novembre 2013, le tribunal administratif d’Orléans a annulé cette décision et cette délibération. Par un arrêt n° 14NT00029 du 10 novembre 2015, la cour administrative d’appel de Nantes a annulé ce jugement, sur appel de la commune de Rigny-Ussé, et a rejeté la demande présentée par M. B… devant le tribunal administratif.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 janvier, 11 avril et 14 septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. B… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de la commune de Rigny-Ussé ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Rigny-Ussé une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Christian Fournier, maître des requêtes,

– les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de M. B…et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la commune de Rigny-Ussé ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B…, propriétaire de parcelles situées dans la zone d’assainissement collectif de la commune de Rigny-Ussé, a sollicité à de nombreuses reprises le raccordement de ses propriétés au réseau d’assainissement collectif de la commune et, en dernier lieu, par un courrier adressé le 31 janvier 2012 au maire de la commune ainsi qu’aux conseillers municipaux. La demande adressée au maire de la commune est restée sans réponse. Par une délibération du 6 juin 2012, le conseil municipal de la commune de Rigny-Ussé a refusé d’engager la dépense correspondant aux travaux de raccordement des propriétés de M. B… au réseau d’assainissement collectif. M. B… se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 10 novembre 2015 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a, d’une part, annulé le jugement du tribunal administratif d’Orléans du 5 novembre 2013 faisant droit à sa demande d’annulation de la décision de rejet implicite de sa demande du 31 janvier 2012 et de la délibération du 6 juin 2012 et, d’autre part, rejeté cette demande d’annulation.

2. Aux termes de l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales :  » Les communes ou leurs établissements publics de coopération délimitent, après enquête publique : / 1° Les zones d’assainissement collectif où elles sont tenues d’assurer la collecte des eaux usées domestiques et le stockage, l’épuration et le rejet ou la réutilisation de l’ensemble des eaux collectées ; / 2° Les zones relevant de l’assainissement non collectif où elles sont tenues d’assurer le contrôle de ces installations et, si elles le décident, le traitement des matières de vidange et, à la demande des propriétaires, l’entretien et les travaux de réalisation et de réhabilitation des installations d’assainissement non collectif (…) « .

3. Il résulte de ces dispositions qu’il appartient aux communes, ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents, qui disposent sur ce point d’un large pouvoir d’appréciation, de délimiter les zones d’assainissement collectif et d’assainissement non collectif en tenant compte de la concentration de la population et des activités économiques productrices d’eaux usées sur leur territoire, de la charge brute de pollution organique présente dans les eaux usées, ainsi que des coûts respectifs des systèmes d’assainissement collectif et non collectif et de leurs effets sur l’environnement et la salubrité publique. Il résulte également de ces dispositions qu’après avoir délimité une zone d’assainissement collectif, les communes, ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents, sont tenues, tant qu’elles n’ont pas modifié cette délimitation, d’exécuter dans un délai raisonnable les travaux d’extension du réseau d’assainissement collectif afin de le raccorder aux habitations qui sont situées dans cette zone et dont les propriétaires en ont fait la demande. Ce délai doit s’apprécier au regard des contraintes techniques liées à la situation topographique des habitations à raccorder, du coût des travaux à effectuer, du nombre et de l’ancienneté des demandes de raccordement. Par suite, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en jugeant que les dispositions du code général des collectivités territoriales ne faisaient pas obligation aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents d’exécuter, dans un délai déterminé, les travaux d’extension de leur réseau d’assainissement collectif afin de le raccorder à une propriété, alors même que celle-ci est située dans une zone d’assainissement collectif approuvée par la commune ou par l’établissement public. Dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, M. B… est fondé a demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Rigny-Ussé la somme de 3 000 euros à verser à M. B… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B…, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt du 10 novembre 2015 de la cour administrative d’appel de Nantes est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Nantes.
Article 3 : La commune de Rigny-Ussé versera à M. B… une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Rigny-Ussé au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A… B…et à la commune de Rigny-Ussé.

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