Les dernières nouvelles

Reversement de la taxe locale d’aménagement : quid de la taxe perçue dans une zone d’activités économiques aménagée par la communauté

Arrêt rendu par Cour administrative d’appel de Lyon
04-02-2021
n° 20LY02074

Texte intégral :
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La communauté de communes de la Plaine dijonnaise a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la commune de Fauverney à lui verser une somme de 1 323 392 €, augmentée des intérêts de droit capitalisés, en réparation du préjudice résultant du refus de cette commune de lui reverser la taxe locale d’équipement et la taxe d’aménagement qu’elle a prélevées auprès de titulaires de permis de construire au sein de la zone d’aménagement économique de la Boulouze.

Par une ordonnance n° 1601710 du 29 décembre 2017, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 18LY00870 du 25 juin 2018, le président de la 3ème chambre de la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise dirigé contre l’ordonnance du 29 décembre 2017.

Par une décision n° 423631 du 29 juillet 2020, le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance du 25 juin 2018 et renvoyé l’affaire devant la cour.

Procédures devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 2 mars 2018 et le 17 décembre 2020, ce dernier mémoire n’ayant pas été communiqué, la communauté de communes de la Plaine dijonnaise, représentée par Me A., demande à la cour :

1°) d’annuler l’ordonnance du 29 décembre 2017 du président du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de condamner la commune de Fauverney à lui verser une somme de 1 323 392 €, augmentée des intérêts de droit dus à compter de la date d’enregistrement de sa requête, eux-mêmes capitalisés ;

3°) de condamner la commune de Fauverney aux entiers dépens et à lui verser une somme de 10 000 € au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– le président du tribunal administratif de Dijon ne pouvait pas rejeter sa demande pour tardiveté par voie d’ordonnance ;

– sa créance n’était pas prescrite ;

– elle est fondée à rechercher, sur le fondement de l’enrichissement sans cause, dont les cinq conditions sont remplies, la responsabilité de la commune qui a perçu ces taxes, qui ont, pour leur part communale, le caractère de redevances pour service rendu, sans toutefois supporter la charge de l’aménagement de la zone et de l’entretien des équipements ;

– à titre subsidiaire, elle est fondée à rechercher cette responsabilité sur le terrain de la faute, les refus de la collectivité de reverser ces taxes étant illégaux ;

– à titre infiniment subsidiaire, elle est fondée à rechercher cette responsabilité sur le terrain de la faute, les refus de la collectivité de reverser ces taxes étant privés de base légale eu égard à l’inconstitutionnalité des textes législatifs fondant ces refus.

Par un mémoire distinct, enregistré le 28 mars 2018, la communauté de communes de la Plaine dijonnaise demande à la cour de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de la constitutionnalité des articles 1635 bis B 1er alinéa du code général des impôts et L. 331-2 alinéa 3 du code de l’urbanisme au regard de l’article 72-2 alinéa 4 de la Constitution ou, subsidiairement, du principe de clarté de la loi et de l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme.

Les parties ont été informées, par courrier en date du 17 août 2020 de la reprise d’instance devant la cour à la suite du renvoi de l’affaire par le Conseil d’Etat.

La requête enregistrée le 2 mars 2018 et le mémoire distinct, enregistré le 28 mars 2018, ont été communiqués le 8 septembre 2020.

Par un mémoire enregistré le 1er décembre 2020, la commune de Fauverney, représentée par Me C., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise une somme de 5 000 € en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

– le reversement des taxes dont le fait générateur est antérieur au 1er janvier 2010 était prescrit ;

– les moyens soulevés par la communauté de communes de la Plaine dijonnaise ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

– la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

– le code général des collectivités territoriales ;

– le code général des impôts ;

– le code de l’urbanisme ;

– le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme D.,

– les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

– et les observations de Me B., représentant la communauté de communes de la Plaine dijonnaise.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 janvier 2021, présentée par la communauté de communes de la Plaine dijonnaise ;

Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes de la Plaine dijonnaise a décidé d’implanter, au titre de sa compétence « aménagement économique », une zone d’activité économique (ZAE) sur le territoire de la commune de Fauverney par décision du 1er février 2007. Elle a pris en charge les travaux de viabilisation de la zone, à hauteur de 4 millions d’euros environ, ainsi que l’entretien des équipements publics mis à disposition des entreprises implantées dans cette zone. Par courrier du 24 novembre 2014, la communauté de communes de la Plaine dijonnaise a mis en demeure la commune de Fauverney de lui régler la somme de 1 323 392 € correspondant à la totalité des taxes locales d’équipement et d’aménagement qu’elle estimait que cette dernière avait indûment perçues depuis 2008 à l’occasion de la délivrance des permis de construire accordés au sein de cette zone. Elle a saisi le tribunal administratif de Dijon d’une demande tendant à ce que la commune de Fauverney soit condamnée à lui verser cette somme, augmentée des intérêts de droit capitalisés, en réparation du préjudice résultant du refus de cette commune de lui reverser les taxes en litige. Par ordonnance du 29 décembre 2017 prise sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif a rejeté pour tardiveté la demande de la communauté de communes. Par ordonnance du 25 juin 2018, le président de la 3e chambre de la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel de la communauté de communes en confirmant le motif de rejet du président du tribunal. Par décision du 29 juillet 2020, le Conseil d’Etat, après avoir censuré le motif de tardiveté retenu par le juge du fond, a annulé l’ordonnance du 25 juin 2018 et renvoyé l’affaire devant la cour.

Sur la régularité de l’ordonnance du président du tribunal administratif :

2. Aux termes de l’article R. 222-1 du code de justice administrative : « Les présidents de tribunal administratif […] peuvent, par ordonnance : […] 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n’est pas tenue d’inviter leur auteur à les régulariser ou qu’elles n’ont pas été régularisées à l’expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; »

3. Il résulte du principe de sécurité juridique que le destinataire d’une décision administrative individuelle qui a reçu notification de cette décision ou en a eu connaissance dans des conditions telles que le délai de recours contentieux ne lui est pas opposable doit, s’il entend obtenir l’annulation ou la réformation de cette décision, saisir le juge dans un délai raisonnable, qui ne saurait, en règle générale et sauf circonstances particulières, excéder un an. Toutefois, cette règle ne trouve pas à s’appliquer aux recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d’une personne publique qui, s’ils doivent être précédés d’une réclamation auprès de l’administration, ne tendent pas à l’annulation ou à la réformation de la décision rejetant tout ou partie de cette réclamation mais à la condamnation de la personne publique à réparer les préjudices qui lui sont imputés. La prise en compte de la sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause indéfiniment des situations consolidées par l’effet du temps, est alors assurée par les règles de prescription prévues par la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics.

4. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 26 novembre 2014, la communauté de communes de la Plaine dijonnaise a saisi la commune de Fauverney d’une demande tendant à ce que celle-ci l’indemnise de préjudices qu’elle lui imputait. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune aurait accusé réception de ce courrier en mentionnant l’existence, en cas de rejet implicite de la demande, des voies et délais de recours. En outre, l’envoi du courrier du 10 décembre 2014, qui, au demeurant, ne mentionnait pas les voies et délais de recours, adressé par le conseil de la commune indiquant que cette dernière n’entendait pas faire droit à cette demande, ne pouvait constituer le rejet de cette demande indemnitaire, dès lors que n’était pas jointe à ce courrier la décision prise par la commune elle-même. Par ailleurs, le rejet implicite né du silence gardé par la commune sur cette demande indemnitaire n’était pas purement confirmatif de précédentes décisions prises par la commune. En outre, la circonstance que la demande de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise a été enregistrée plus d’un an après le rejet de sa réclamation est sans incidence sur sa recevabilité. Enfin, la circonstance que les créances litigieuses seraient pour partie prescrites, s’il elle peut le cas échéant avoir une incidence sur le bien-fondé de la demande indemnitaire, est également sans incidence sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal. Dans ces conditions, la demande présentée par la communauté de communes de la Plaine dijonnaise devant le tribunal administratif de Dijon n’était pas tardive.

5. Par suite, c’est à tort que le président du tribunal administratif de Dijon, statuant sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1, a rejeté comme manifestement irrecevable la demande de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise. L’ordonnance attaquée doit donc être annulée.

6. Il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la communauté de communes de la Plaine dijonnaise devant le tribunal administratif de Dijon.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

7. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que la cour administrative d’appel, saisie d’un moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un mémoire distinct et motivé, statue par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

8. Aux termes de l’article 1635 bis B du code général des impôts relatif aux groupements de commune et à la taxe d’équipement, dans sa rédaction résultant de l’article 22 de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985, abrogé par l’article 28 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 : « Lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale a dans sa compétence la réalisation d’équipements publics d’infrastructure, il peut exercer les pouvoirs appartenant aux conseils municipaux en vertu des articles 1585 A, et du II des articles 1585 C et 1585 E et percevoir la taxe à son profit. Cette faculté peut être exercée par les établissements publics chargés de la gestion d’agglomérations nouvelles. La décision d’exercer les pouvoirs susmentionnés est prise avec l’accord des conseils municipaux concernés, sauf si le produit de la taxe constitue une recette dudit établissement public en vertu du statut de celui-ci. L’établissement public peut décider de reverser aux communes qu’il groupe une partie des sommes perçues au titre de la taxe. »

9. Aux termes du 3ème alinéa de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme, introduit par l’article 89 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 : « Dans les cas mentionnés aux 1° et 2°, tout ou partie de la taxe perçue par la commune peut être reversé à l’établissement public de coopération intercommunale ou aux groupements de collectivités dont elle est membre, compte tenu de la charge des équipements publics relevant, sur le territoire de cette commune, de leurs compétences, dans les conditions prévues par délibérations concordantes du conseil municipal et de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du groupement de collectivités. »

10. En premier lieu, le 3ème alinéa de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme, qui n’est entré en vigueur que le 1er janvier 2014, n’est pas applicable au présent litige qui porte sur le reversement par la commune de Fauverney de la taxe d’aménagement qu’elle avait perçue avant l’entrée en vigueur de ces dispositions.

11. En deuxième lieu, l’article 72-2 de la Constitution dispose, en son quatrième alinéa : « Tout transfert de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. »

12. Ces dispositions sont relatives aux transferts de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales et non aux transferts de compétences entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale. Dès lors, les dispositions litigieuses ne sauraient méconnaître l’article 72-2 de la Constitution au seul motif qu’en n’imposant pas aux communes de reverser la taxe locale d’équipement et la taxe d’aménagement aux établissements publics qui ont supporté le financement des équipements publics sur le territoire, elles ne permettraient pas aux établissements publics de coopération intercommunale de disposer des ressources suffisantes pour exercer leurs compétences.

13. En troisième lieu, le principe d’intelligibilité, d’accessibilité et de clarté de la loi est un objectif à valeur constitutionnelle qui ne peut être invoqué utilement à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité.

14. Il résulte de ce qui précède, d’une part, que le 3ème alinéa de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme introduit dans cet article par l’article 89 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 n’est pas applicable au présent litige et, d’autre part, que la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article 1635 bis B du code général des impôts est dépourvue de caractère sérieux. Il n’y a, dès lors, pas lieu de transmettre ces questions prioritaires de constitutionnalité au Conseil d’Etat.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne les conclusions présentées à titre principal sur le fondement de l’enrichissement sans cause :

15. D’une part, aux termes de l’article 1585 A du code général des impôts, dans sa rédaction abrogée par l’article 28 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 : « Une taxe locale d’équipement, établie sur la construction, la reconstruction et l’agrandissement des bâtiments de toute nature, est instituée […] / 2° Par délibération du conseil municipal dans les autres communes. […] / La taxe est perçue au profit de la commune. Elle a le caractère d’une recette extraordinaire. » Aux termes de l’article 1585 D du même code : « I. L’assiette de la taxe est constituée par la valeur de l’ensemble immobilier comprenant les terrains nécessaires à la construction et les bâtiments dont l’édification doit faire l’objet de l’autorisation de construire. / Cette valeur est déterminée forfaitairement en appliquant à la surface de plancher développée hors oeuvre une valeur au mètre carré variable selon la catégorie des immeubles. […]. »

16. D’autre part, aux termes aux termes de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de l’article 28 de la loi n° 2010-1658 : « La part communale ou intercommunale de la taxe d’aménagement est instituée : 1° De plein droit dans les communes dotées d’un plan local d’urbanisme ou d’un plan d’occupation des sols, sauf renonciation expresse décidée par délibération dans les conditions prévues au huitième alinéa ; / 2° Par délibération du conseil municipal dans les autres communes ; / […] 4° Par délibération de l’organe délibérant dans les autres établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d’urbanisme en lieu et place des communes qu’ils regroupent et avec leur accord exprimé dans les conditions prévues par le II de l’article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales. / La taxe mentionnée aux 1° à 4° est instituée sur l’ensemble du territoire de la commune ou dans l’ensemble des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale. / Dans les cas mentionnés aux 3° et 4°, une délibération de l’organe délibérant prévoit les conditions de reversement de tout ou partie de la taxe perçue par l’établissement public de coopération intercommunale à ses communes membres compte tenu de la charge des équipements publics relevant de leurs compétences. […] Le produit de la taxe est affecté en section d’investissement du budget des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale. » Aux termes de l’article L. 331-6 du même code : « Les opérations d’aménagement et les opérations de construction, de reconstruction et d’agrandissement des bâtiments, installations ou aménagements de toute nature soumises à un régime d’autorisation en vertu du présent code donnent lieu au paiement d’une taxe d’aménagement, sous réserve des dispositions des articles L. 331-7 à L. 331-9. / Les redevables de la taxe sont les personnes bénéficiaires des autorisations mentionnées au premier alinéa du présent article ou, en cas de construction sans autorisation ou en infraction aux obligations résultant de l’autorisation de construire ou d’aménager, les personnes responsables de la construction. / Le fait générateur de la taxe est, selon les cas, la date de délivrance de l’autorisation de construire ou d’aménager, celle de délivrance du permis modificatif, celle de la naissance d’une autorisation tacite de construire ou d’aménager, celle de la décision de non-opposition à une déclaration préalable ou, en cas de construction sans autorisation ou en infraction aux obligations résultant de l’autorisation de construire ou d’aménager, celle du procès-verbal constatant la ou les infractions. »

17. Il résulte de ces dispositions que la taxe locale d’équipement et la taxe d’aménagement présentent non le caractère de rémunérations pour services rendus, mais celui d’impositions auxquelles sont soumises, s’agissant de la taxe locale d’aménagement, la construction, la reconstruction ou l’agrandissement de bâtiments de toute nature et, s’agissant de la taxe d’aménagement, les opérations d’aménagement et les opérations de construction, de reconstruction et d’agrandissement des bâtiments, installations ou aménagements de toute nature soumises à un régime d’autorisation en vertu du code de l’urbanisme. Ces taxes, qui n’ont pas spécifiquement pour objet de financer les équipements publics et aménagements de la ZAE dans le périmètre de laquelle les autorisations sont délivrées, ne trouvent pas leur contrepartie dans l’utilisation des équipements et ouvrages présents dans cette zone. Par suite, la communauté de communes de la Plaine dijonnaise ne démontre pas qu’en percevant, à l’occasion de la délivrance des permis de construire dans la ZAE, la taxe locale d’équipement puis ensuite, la taxe d’aménagement, la commune de Fauverney se serait enrichie sans cause à son détriment.

En ce qui concerne les conclusions, présentées à titre subsidiaire et infiniment subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité pour faute :

18. La communauté de communes de la Plaine dijonnaise demande, à titre subsidiaire puis infiniment subsidiaire, à être indemnisée sur le fondement de la responsabilité pour faute, du préjudice qu’elle estime avoir subi et résultant du refus illégal de la commune de reverser le produit de la taxe locale d’équipement et de la part locale de la taxe d’aménagement.

19. Elle fait valoir, à titre subsidiaire, que le refus de la commune est illégal au regard respectivement de l’article 1635 bis B du code général des impôts et de l’article L. 331-2 du code de l’urbanisme, qui doivent être interprétés à la lumière de l’article L. 331-1 du code de l’urbanisme comme imposant à la commune, lorsque l’établissement public de coopération intercommunale a en charge la réalisation des équipements publics, le reversement des taxes à l’établissement public de coopération intercommunale.

20. L’article 1635 bis B du code général des impôts subordonne la possibilité pour un établissement public de coopération intercommunale de percevoir la taxe locale d’équipement en lieu et place des communes à ce qu’une telle décision soit prise avec l’accord des conseils municipaux concernés, sauf si le produit de la taxe constitue une recette dudit établissement public en vertu du statut de celui-ci. L’article L. 331-2 du code de l’urbanisme prévoit que la taxe d’aménagement est perçue par l’établissement public de coopération intercommunale lorsqu’il est compétent en matière de plan local d’urbanisme en lieu et place des communes qu’ils regroupent et avec leur accord. En l’espèce, aucun accord n’ayant été donné par les communes et la communauté de communes de la Plaine dijonnaise n’étant pas compétente en matière de plan local d’urbanisme, seule la commune de Fauverney était compétente pour instituer et percevoir la taxe locale d’équipement. Aucune disposition législative ne prévoyait, avant l’entrée en vigueur de l’article 89 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 mentionnée au point 9, le reversement à l’établissement public de coopération intercommunale d’une partie du produit de ces taxes, compte tenu de la charge des équipements publics relevant, sur le territoire de cette commune, de sa compétence. Ainsi, et alors que si ces taxes, qui permettent, conformément à l’objectif qui leur est assigné par l’article L. 331-1 du code de l’urbanisme, de financer les équipements publics se trouvant sur le territoire communal, n’en constituent cependant pas le mode de financement exclusif, la commune de Fauverney n’a pas méconnu les dispositions légales invoquées par la communauté de communes de la Plaine dijonnaise en refusant de lui reverser le montant des taxes qu’elle avait perçues au titre des permis de construire délivrés dans la ZAE entre la création de cette zone en 2007 et novembre 2012. Par suite, la communauté de communes de la Plaine dijonnaise n’est pas fondée à engager, pour ce motif, la responsabilité pour faute de la commune.

21. La communauté de communes de la Plaine dijonnaise fait valoir, à titre infiniment subsidiaire, que si la cour doit estimer que la loi n’impose par le reversement des taxes perçues par la collectivité, ces dispositions législatives sont nécessairement inconstitutionnelles et que les refus de la commune, dépourvus en conséquence de base légale, sont constitutifs d’une illégalité fautive pouvant engager sa responsabilité. Toutefois, pour les motifs exposés aux points 7 à 14, ce moyen doit être écarté. Par suite, les conclusions de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise présentées sur ce fondement doivent être rejetées.

22. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner le moyen présenté en défense tiré de la prescription quadriennale opposable à une partie des conclusions indemnitaires, que la communauté de communes de la Plaine dijonnaise n’est pas fondée à demander la condamnation de la commune de Fauverney à lui verser une somme en réparation du préjudice qu’elle aurait subi. Ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que, en tout état de cause, celles tendant à ce que les dépens soient mis à la charge de la commune de Fauverney, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

23. Il y a lieu, en revanche, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à sa charge une somme de 2 000 € au titre des frais exposés par la commune de Fauverney et non compris dans les dépens.

Décide :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la communauté de communes de la Plaine dijonnaise.

Article 2 : L’ordonnance du 29 décembre 2017 du président du tribunal administratif de Dijon est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise est rejeté.

Article 4 : La communauté de communes de la Plaine dijonnaise versera à la commune de Fauverney une somme de 2 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes de la Plaine dijonnaise et à la commune de Fauverney.

Regardez aussi !

Immeuble menaçant ruine : quels sont les pouvoirs du maire pour ordonner la démolition ?

Arrêt rendu par Conseil d’Etat 04-07-2024 n° 464689 Texte intégral : Vu la procédure suivante …