Vu la procédure suivante :
Mme K. C. a demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler l’arrêté du 5 août 2019 par lequel le maire d’Aubignan a accordé à M. G. C. un permis de construire un hangar, ainsi que la décision du 19 novembre 2019 rejetant son recours gracieux. Par une ordonnance n° 2000214 du 28 septembre 2020, le président de la 1re chambre du tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 20MA04365 du 28 janvier 2021, rendue sur le fondement de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la 9e chambre de la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel de Mme C.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 29 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, Mme C. demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cette ordonnance ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de M. C. et de la commune d’Aubignan la somme de 3 500 € chacun au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la Constitution, notamment la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ;
– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d’Etat,
– les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de Mme C. et au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. C. ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que Mme C. a demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler un permis de construire accordé à M. C. Par une ordonnance n° 2000214 du 28 septembre 2020, le président de la 1re chambre du tribunal administratif a rejeté sa demande comme irrecevable. Mme C. se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du 28 janvier 2021 par laquelle le président de la 9e chambre de la cour administrative d’appel de Marseille, sur le fondement de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, a jugé son appel manifestement dépourvu de fondement et l’a rejeté.
2. En premier lieu, il ressort des pièces de la procédure suivie devant la cour, et des termes mêmes de l’ordonnance attaquée, que la requête d’appel de Mme C. n’a pas été communiquée à M. C., de sorte que l’instruction contradictoire n’a pas été ouverte par le juge. Par suite, le moyen tiré de ce que cette ordonnance est entachée d’irrégularité faute de communication à la requérante du mémoire spontanément produit par M. C., dont les moyens ne sont pas analysés et sur lequel le juge d’appel ne s’est pas fondé, ne peut qu’être écarté.
3. En second lieu, d’une part, aux termes de l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme : « Une association n’est recevable à agir contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l’association en préfecture est intervenu au moins un an avant l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire » ; en vertu de l’article L. 600-1-2 du même code : « Une personne autre que l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l’aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation / Le présent article n’est pas applicable aux décisions contestées par le pétitionnaire. »
4. D’autre part, l’article R. 600-4 du même code dispose que : « Les requêtes dirigées contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d’irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, du contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation, du contrat de bail, ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l’occupation ou de la détention de son bien par le requérant / Lorsqu’elles sont introduites par une association, ces mêmes requêtes doivent, à peine d’irrecevabilité, être accompagnées des statuts de celle-ci, ainsi que du récépissé attestant de sa déclaration en préfecture. / Le présent article n’est pas applicable aux décisions contestées par le pétitionnaire. »
5. Il appartient à l’auteur d’un recours contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol, autre que le pétitionnaire, de produire la ou les pièces requises par l’article R. 600-4 du code de l’urbanisme, notamment, s’agissant d’un requérant autre que l’Etat, une collectivité territoriale, un groupement de collectivités territoriales ou une association, le titre ou l’acte correspondant au bien dont les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance seraient selon lui directement affectées par le projet litigieux. Dans le cas où, à la suite d’une fin de non-recevoir opposée sur ce point par le défendeur ou, à défaut, d’une invitation à régulariser qu’il appartient alors au tribunal administratif de lui adresser, la ou les pièces requises par ces dispositions n’ont pas été produites, la requête doit être rejetée comme irrecevable. Sous réserve du cas dans lequel le juge d’appel annulerait le jugement et statuerait sur la demande de première instance par la voie de l’évocation, le requérant n’est pas recevable à produire pour la première fois en appel ces éléments justificatifs, notamment, s’agissant d’un requérant entrant dans le champ d’application du premier alinéa de l’article R. 600-4, le titre ou l’acte correspondant à l’intérêt pour agir dont il se prévalait en première instance.
6. Une telle exigence, qui répond, comme l’article R. 600-4 lui-même, à l’objectif de bonne administration de la justice et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du requérant mis à même de s’acquitter de l’obligation mise à sa charge, n’est contraire ni à l’article 16 de la Déclaration de 1789, ni à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. S’il est soutenu qu’en l’espèce une circonstance particulière aurait justifié d’écarter l’application de cette règle sur le fondement de la convention européenne, ce moyen est en tout état de cause nouveau en cassation et, par suite, inopérant.
7. Il résulte de ce qui précède qu’en jugeant que Mme C., qui s’était prévalue devant le tribunal administratif de Nîmes de sa qualité de voisine du projet litigieux mais n’avait pas produit, en dépit de l’invitation à régulariser que lui avait adressée le tribunal, le titre de propriété correspondant au bien qu’elle alléguait détenir en cette qualité, n’était pas recevable à produire cette pièce pour la première fois en appel, le président de la 9e chambre de la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme C. doit être rejeté. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à sa charge une somme en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Décide :
Article 1er : Le pourvoi de Mme C. est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. C. en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.