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Garantie décennale : interdiction pour l’assureur d’intervenir à l’instance

Conseil d’État

N° 346257
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
7ème et 2ème sous-sections réunies
M. Christian Vigouroux, président
M. Fabrice Aubert, rapporteur
M. Nicolas Boulouis, rapporteur public
SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; SCP ROGER, SEVAUX ; SCP ORTSCHEIDT ; SCP BOULLOCHE ; LE PRADO ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN ; SCP GADIOU, CHEVALLIER, avocats

lecture du vendredi 18 novembre 2011

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 janvier et 29 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD, dont le siège est au 26 rue Drouot à Paris (75009) ; la société demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt n° 08MA02197-08MA02279 du 29 novembre 2010 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l’annulation des articles 1er, 2 et 10 du jugement n° 0203646-0203760-0203764 du tribunal administratif de Nice du 18 janvier 2008 ayant condamné solidairement la société d’architectes
Bordes-Nothelfer-Duchier, la société Jacobs-France, Me Bor en qualité de liquidateur de la société Somec, et le bureau de contrôle technique Socotec à verser la somme de 13 000 euros à la société AGF-IART avec intérêts au taux légal à compter du 31 juillet 2002, condamné Me D en qualité de liquidateur de la société Somec à verser 400 euros à la société AGF-IART avec intérêts au taux légal à compter du 31 juillet 2002, et condamné Me D en qualité de liquidateur de la société Somec à garantir le bureau de contrôle technique Socotec à hauteur de 20 % des condamnations prononcées à son encontre ;

2°) de mettre à la charge de la société Allianz-IARD le versement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 octobre 2011, présentée pour la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Fabrice Aubert, Auditeur,

– les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD, de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la commune de Toulon, de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Allianz-IARD, de la SCP Boulloche, avocat de la Société d’architectes Bordes Bonnet Pietra et de M. Claude C, de Me Le Prado, avocat de la société Smac, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la compagnie d’assurances L’Auxiliaire et de la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la société Planitec et de la société SMABTP,

– les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD, à la SCP Roger, Sevaux, avocat de la commune de Toulon, à la SCP Ortscheidt, avocat de la société Allianz-IARD, à la SCP Boulloche, avocat de la Société d’architectes Bordes Bonnet Pietra et de M. Claude C, à Me Le Prado, avocat de la société Smac, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la compagnie d’assurances L’Auxiliaire et à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la société Planitec et de la société SMABTP ;

Considérant que la commune de Toulon a passé plusieurs marchés publics portant sur la construction d’une nouvelle salle de spectacles baptisée Zénith Omega ; qu’à la suite de l’apparition de désordres sur le bâtiment, la commune a fait quatre déclarations de sinistre en 1999, 2000, 2001 et 2002 auprès de son assureur, la société AGF-IART, condamnée par le tribunal de grande instance de Toulon à lui verser une provision de 150 000 euros au titre de ces désordres ; que la société AGF-IART et la commune de Toulon ont saisi, le 30 juillet 2002, le tribunal administratif de Nice de requêtes afin de rechercher la responsabilité de divers constructeurs de l’ouvrage, dont Maître D en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Somec ; que la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD, assureur de la société Somec est intervenue à l’instance au soutien des conclusions de sa cliente ; que par jugement du 18 janvier 2008, le tribunal administratif de Nice a retenu la responsabilité décennale de la société Somec et l’a condamnée, solidairement avec les autres constructeurs, au versement d’une somme de 13 000 euros et à la garantie du bureau de contrôle technique Socotec à hauteur de 20% des condamnations prononcées à son encontre ; qu’en sa qualité d’intervenant en première instance, la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD a entendu faire appel de ce jugement ; que par arrêt du 29 novembre 2010, contre lequel la compagnie d’assurances se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté cet appel comme irrecevable, faute d’intérêt pour agir ;

Considérant en premier lieu que, contrairement à ce que soutient la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD, le présent litige, qui concerne à titre principal son assurée, est sans incidence directe sur ses droits et obligations à caractère civil ; que par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait méconnu les stipulations de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en rejetant son appel comme irrecevable est inopérant ;

Considérant en deuxième lieu que, dans les litiges de plein contentieux, sont seules recevables à former une intervention les personnes qui peuvent se prévaloir d’un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier ; que l’assureur d’un constructeur dont la responsabilité décennale est recherchée ne peut être regardé comme pouvant, dans le cadre d’un litige relatif à l’engagement de cette responsabilité, se prévaloir d’un droit de cette nature ; que par suite, en rejetant comme irrecevable l’appel de la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD, intervenante en première instance en qualité d’assureur de la société Somec, au motif qu’elle n’avait pas qualité pour agir, la cour administrative d’appel de Marseille n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant en troisième lieu que la COMPAGNIE D’ASSURANCES
AXA-FRANCE-IARD n’aurait pas été, au stade de l’appel, recevable à contester le jugement du tribunal administratif de Nice en tant que ce dernier a admis son intervention, cet aspect du dispositif ne lui faisant pas grief ; que la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD ne peut, par suite, utilement invoquer en cassation la circonstance que la cour aurait dû, dès lors qu’elle niait son intérêt pour agir dans le présent litige, relever d’office l’irrecevabilité de son intervention en première instance ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Allianz-IARD, par la société Smac, par la compagnie d’assurances L’Auxiliaire et par les sociétés Planitec et SMABTP au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : Le pourvoi de la COMPAGNIE D’ASSURANCES AXA-FRANCE-IARD est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de la société Allianz-IARD, de la société Smac, de la compagnie d’assurances L’Auxiliaire et des sociétés Planitec et SMABTP au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE D’ASSURANCES
AXA-FRANCE-IARD, à la société Allianz-IARD, à la société Smac, à la compagnie d’assurances L’Auxiliaire, à la commune de Toulon, à la société Jacobs France, à la société d’architectes Bordes Bonnet Pietra, à M. Claude C, à Me D en qualité de liquidateur de la société Somec, au bureau de contrôle technique Socotec, à la société Eiffel, à la compagnie Axa Corporate Solutions en qualité d’assureur de la société Eiffel, à la société Planitec, à Me A en qualité de liquidateur de la société Sometra, à la société SNC Tunzini et à la société SMABTP.

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