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Que recouvre la théorie du propriétaire apparent ?

I – Définition du titre habilitant à construire.

Un « titre habilitant à construire » s’entend ou de l’autorisation du propriétaire du terrain ou d’un droit opposable au propriétaire du terrain.

II – Régularisation de l’absence de titre habilitant à construire (avant la décision).

La demande de PC peut être régularisée jusqu’à la délivrance de l’autorisation (CE sect. 7 mars 1969 Ville de Lille, Lebon p.149).

III – Régularisation de l’absence de titre habilitant à construire (après la décision).

La qualité de pétitionnaire peut être appréciée en prenant en compte des éléments postérieurs à la délivrance du permis de construire :

– une association à qui la Commune avait décidé de louer un terrain par bail emphytéotique, alors même que le bail n’avait été conclu que postérieurement (CE 26 février 1988, Assoc. Pour la sauvegarde du Parc de Saint-Leu, rec. CE 90)

« Considérant, en premier lieu, que le conseil municipal de la commune de Saint-Leu-la-Forêt a, par délibération du 17 décembre 1982, décidé de louer par bail emphytéotique à l’association des parents d’adultes et de jeunes handicapés (APAJH), un terrain lui appartenant en vue de la construction d’une maison d’accueil spécialisée pour handicapés ; qu’ainsi et alors même que le bail n’a été conclu que postérieurement, cette dernière association justifiait d’un titre l’habilitant à construire, u sens de l’article R. 421-1 du code de l’urbanisme, et l’autorisait à présenter une demande de permis de construire sur ce terrain ; »

– a également un titre une société, lorsqu’il ressort d’un jugement judiciaire (postérieur à la date de délivrance du permis de construire) que la société pétitionnaire était, à la date de délivrance du permis propriétaire de la parcelle (CAA Lyon, 12 mai 1998, Cne Sorbiers, Gaz. Pal. 1999, 2.)

« Considérant que la SCI MOULIN-GILIER a indiqué dans sa demande de permis de construire être propriétaire de la parcelle cadastrée sous le n° AW 210, et à joint à son dossier une attestation par laquelle le propriétaire de l’autre parcelle composant le terrain d’assiette du projet, cadastrée sous le n° AW 211, a donné son accord au dépôt de la demande ; que si Mme FAURE-MEDAILLON soutient que cette dernière parcelle empiéterait sur l’assiette d’un chemin privé communal, il résulte des pièces du dossier, notamment d’un jugement du tribunal de grande instance de SAINT-ETIENNE en date du 20 décembre 1995 confirmé par un arrêt de la cour d’appel de LYON en date du 26 février 1998, que la société pétitionnaire était, à la date de délivrance du permis de construire litigieux, propriétaire de la totalité de ladite parcelle ; »

IV – Application de la théorie de l’apparence palliant l’absence de titre habilitant à construire au moment de la décision.

– La preuve de l’absence de titre doit être apportée par le requérant.

Il appartient aux requérants d’apporter des éléments de nature à établir que le pétitionnaire n’était pas habilité à présenter la demande de permis de construire (CE 6 février 1998, Sté Dramont Loisirs c/ Sté Dramont Aménagement, n°132618)

« Considérant que si les associations requérantes soutiennent que les arrêtés attaqués méconnaissent les dispositions de l’article R. 421-1-1 du code de l’urbanisme en ce que la SOCIETE DRAMONT LOISIRS n’était pas, à la date du dépôt de demande des permis, habilitée à les présenter, elles n’apportent aucun élément de nature à apprécier le bien fondé de ce moyen qui doit écarté ; »

– Le juge administratif évalue la teneur des informations dont disposait l’administration au moment de la demande.

Le juge regardera si, en l’état des informations dont l’administration disposait à la date de délivrance du permis de construire, elle ne pouvait que regarder comme propriétaires les pétitionnaires (CE 11 juin 1997, M. Debenest, n°122432).

« Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que si M. DEBENEST soutient que les époux Boinot n’étaient pas propriétaires de l’immeuble, le maire de Niort, lorsqu’il a délivré le 21 mai 1990 le permis de construire attaqué pour l’agrandissement dudit immeuble, ne pouvait, en l’état des informations dont il disposait, que regarder comme propriétaires de cet immeuble les époux Boinot, qui l’avaient acquis par voie d’adjudication le 7 juillet 1988 ; que M. DEBENEST, ancien propriétaire, n’apporte aucun élément de nature à établir que la qualité de propriétaires des époux Boinot aurait été sérieusement mise en cause à la date de délivrance du permis litigieux ; »

– Le permis doit être délivré si aucun élément ne permet à l’autorité administrative de douter de la qualité de propriétaire.

En toute hypothèse, un permis de construire est délivré à un pétitionnaire dont rien n’indiquait au maire qu’il pourrait ne pas être propriétaire du terrain d’assiette (CE 18 mai 1998, M. Erding, req. 168.893)

« Considérant que pour contester la légalité du permis de construire accordé à M. ERDING pour l’extension de son logement, M. et Mme Gabardo ont fait valoir devant la cour administrative d’appel de Lyon que, contrairement à ce que prétendait M. ERDING, la construction projetée affectait les parties communes de l’immeuble en copropriété « Le Coquillat » et nécessitait de ce fait l’assentiment des autres co-propriétaires ; que pour confirmer l’annulation du permis de construire décidée par les premiers juges, la Cour s’est exclusivement fondée sur l’absence d’accord des copropriétaires, sans rechercher si le maire de la commune de Saint-Clair-la-Tour, qui avait délivré le permis, avait été informé de la situation juridique du terrain d’assiette du permis et si M. ERDING ne pouvait pas, compte tenu de la demande qu’il avait présentée, être regardé comme le propriétaire apparent du terrain ; qu’en procédant ainsi la Cour a fait une application erronée des dispositions précitées de l’article R. 421-1 du code de l’urbanisme ; »

Conclusions contraires du commissaire du gouvernement sous Erding (BJDU 4/98, p.277) :

« Dès lors que le pétitionnaire déclare être le propriétaire du terrain, ou agit avec l’accord d’une personne qui déclare être propriétaire, sans qu’aucun élément porté à la connaissance de l’administration vienne jeter un doute sur l’exactitude de ces déclarations, la demande peut être regardée comme répondant aux exigences de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme ».

« En vertu de cette théorie, le permis de construire est légalement délivré à la personne qui peut être regardée comme le propriétaire apparent du terrain d’assiette du projet à la date à laquelle l’administration statue. Si cette condition est respectée, le moyen tiré de ce qu’en réalité le pétitionnaire n’étais pas propriétaire est inopérant devant le juge de l’excès de pouvoir (CE 28 février 1969, SCI Les tamaris, rec. p131 ; CE 17 octobre 1973, Ministre de l’Equipement et du Logement c/ Souilhac, rec. p.575) »

V – En conclusion

L’administration s’en tient à l’apparence et ne sollicite aucun titre de propriété, ce qui fait dire à l’auteur :

« En apparence l’article R.421-1-1du Code de l’urbanisme dispose : la demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain.

Mais en réalité il veut dire :

La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant de l’apparence d’un titre l’habilitant à construire sur le terrain » (H. Blais, Le droit de l’apparence et l’apparence du droit, BJDU 1/1999, p.2).

Lorsque le maire n’est pas informé d’une contestation relative au titre de propriété, le juge appliquera la théorie du propriétaire apparent en se plaçant dans la situation et au vu des documents joints à la demande (sauf cas de fraude ou de manœuvre du pétitionnaire), et lorsque, au contraire, le maire a eu une telle information, soit le pétitionnaire a produit un titre de propriété et l’application de la théorie du propriétaire apparent conduit à juger le permis légal même si la validité du titre est contestée par la partie adverse, soit le pétitionnaire ne peut produire aucun justificatif et la partie adverse démontre qu’il n’est pas (le seul) propriétaire et le permis sera annulé.

En tout état de cause, un requérant ne peut utilement invoquer un défaut de titre lorsque aucune contestation n’a été élevée par lui devant l’administration sur les titres à demander le permis (CE 2 juin 1993, Michel Guérin, req. n°135611)

« Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article R.422-1 du code de l’urbanisme, applicable aux constructions ou travaux dont la faible importance ne justifie pas, en vertu de l’article L.422-1 du même code, l’exigence d’un permis de construire,  » … une déclaration de travaux est présentée par le propriétaire du terrain, son mandataire ou la personne ayant qualité pour exécuter les travaux … » ; qu’en l’état du dossier soumis au préfet de l’Aisne, lequel dossier ne comportait aucune déclaration inexacte, Mme Guérin devait être regardée comme le propriétaire apparent de l’immeuble sis à Saint-Erme auquel elle se proposait d’adjoindre une véranda ; qu’aucune contestation n’a été élevée par M. GUERIN devant l’administration sur les titres de Mme Guérin à demander ce permis de construire ; que dans ces conditions M. GUERIN ne saurait utilement soutenir qu’en ne s’opposant pas à l’exécution des travaux, et en se bornant à les soumettre au respect de prescriptions particulières, le préfet de l’Aisne a méconnu les dispositions précitées de l’article R.422-1 du code de l’urbanisme ; qu’il ressort en outre des pièces du dossier que l’arrêté du préfet de l’Aisne en date du 14 juin 1991 n’est entaché d’aucune erreur manifeste d’appréciation ; que dans ces conditions M. GUERIN n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d’Amiens a rejeté sa demande ; »

Frédéric RENAUDIN

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