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Urbanisation en continuité : l’appréciation se fait par rapport à l’unité foncière, l’assiette du projet, non nécessairement à la parcelle !

Conseil d’État – 10ème – 9ème chambres réunies
N° 491613
ECLI:FR:CECHR:2025:491613.20251003
Inédit au recueil Lebon
Lecture du vendredi 03 octobre 2025
Rapporteur
M. Emmanuel Weicheldinger
Rapporteur public
M. Frédéric Puigserver
Avocat(s)
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, FELIERS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré au tribunal administratif de Marseille l’arrêté du 27 avril 2021 par lequel le maire de Berre-l’Etang (Bouches-du-Rhône) a délivré un permis de construire à M. A… C… et Mme B… C… pour la construction de deux pavillons, comprenant chacun deux logements et deux garages, sur des parcelles cadastrées BY nos 219, 220 et 221.

Par un jugement n° 2109266 du 10 janvier 2024, le tribunal administratif de Marseille a partiellement annulé l’arrêté attaqué en tant qu’il porte autorisation de construire sur les parcelles nos 219 et 220.

Par une ordonnance n° 24MA00215 du 7 février 2024, enregistrée le 9 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la présidente de la cour administrative d’appel de Marseille a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 1er février 2024 au greffe de cette cour, présenté par M. et Mme C….

Par ce pourvoi et deux nouveaux mémoires, enregistrés le 6 mai 2024 et le 6 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme C… demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter le déféré du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Emmanuel Weicheldinger, maître des requêtes en service extraordinaire,

– les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, Feliers, avocat de M. et Mme C… ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 27 avril 2021, le maire de la commune de Berre-l’Etang a délivré à M. A… C… et Mme B… C… un permis de construire deux pavillons, comprenant chacun deux logements et deux garages, sur un terrain situé au hameau de Mauran et correspondant aux parcelles cadastrées BY nos 219, 220 et 221. Par un jugement n° 2109266 du 10 janvier 2024, le tribunal administratif de Marseille a, sur déféré du préfet des Bouches-du-Rhône, partiellement annulé cet arrêté en ce qu’il autorisait la construction d’un pavillon sur les parcelles nos 219 et 220. M. et Mme C… se pourvoient en cassation contre ce jugement en tant qu’il annule partiellement l’arrêté du 27 avril 2021.

2. Aux termes de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige :  » L’extension de l’urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement.  » Le respect du principe de continuité posé par ces dispositions doit être apprécié en resituant le terrain d’assiette du projet, pris dans sa globalité, dans l’ensemble de son environnement, sans s’en tenir aux constructions situées sur les seules parcelles limitrophes de ce terrain.

3. Pour annuler partiellement le permis de construire litigieux au motif qu’un des deux pavillons dont il autorisait la construction méconnaissait le principe de continuité posé par l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, le tribunal administratif de Marseille s’est fondé sur la circonstance que ce pavillon devait être implanté sur des parcelles dont il a considéré que, contrairement à la parcelle destinée à accueillir l’autre pavillon autorisé par le permis, elles ne jouxtaient aucun terrain bâti. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 qu’en appréciant le respect du principe de continuité au regard non du terrain d’assiette du projet pris dans son ensemble, mais de chaque parcelle cadastrale le composant, le tribunal a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, les requérants sont fondés à demander l’annulation du jugement qu’ils attaquent, en tant qu’il annule partiellement l’arrêté du 27 avril 2021.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme C… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :
————–
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 janvier 2024 est annulé en tant qu’il annule partiellement l’arrêté du maire de Berre-l’Etang en date du 27 avril 2021.
Article 2 : L’affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Marseille.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l’aménagement, du territoire et de la décentralisation, à la commune de Berre-l’Etang et à M. A… C… et Mme B… C….
Délibéré à l’issue de la séance du 5 septembre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Didier Ribes, conseillers d’Etat et M. Emmanuel Weicheldinger, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 3 octobre 2025.

Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Emmanuel Weicheldinger
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaule

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