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Plan d’alignement et possession des biens ultérieure : suspension impossible

Conseil d’État

N° 350834
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
8ème et 3ème sous-sections réunies
M. Christian Vigouroux, président
M. Maxime Boutron, rapporteur
M. Laurent Olléon, rapporteur public
SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP DIDIER, PINET, avocats

lecture du lundi 26 mars 2012

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat les 12 et 28 juillet 2011, présentés pour l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR, dont le siège est 23 rue Victor Hugo à Colmar (68000), M. Claude B, demeurant …, M. et Mme A, demeurant …, M. André Noël D, demeurant … et M. et Mme Jean-Pierre C, demeurant … ; ils demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 1102664 du 27 juin 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l’article L. 521-4 du code de justice administrative, a mis fin à la suspension, ordonnée par le juge des référés le 13 mai 2011, de la délibération du 28 juin 2010 du conseil municipal de Colmar adoptant le plan d’alignement de la rue des Anémones ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Colmar la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Maxime Boutron, Auditeur,

– les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat de l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR et de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la ville de Colmar,

– les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Didier, Pinet, avocat de l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la ville de Colmar ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg que, par une délibération du 28 juin 2010, le conseil municipal de la commune de Colmar a adopté le plan d’alignement de la rue des Anémones et a décidé du classement et du déclassement des emprises consignées sur ce plan ; que l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR, M. B, M. et Mme A, M .D, M. et Mme C ont demandé l’annulation de cette délibération ; que, par une ordonnance du 13 mai 2011, le juge des référés a suspendu l’exécution de la délibération du 28 juin 2010 ; que l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR et autres demandent l’annulation de l’ordonnance du 27 juin 2011 par laquelle le juge des référés, statuant sur le fondement de l’article L. 521-4 du code de justice administrative, a mis fin aux effets de sa précédente ordonnance ;

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :  » Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision  » ; qu’aux termes de l’article L.521-4 du même code :  » Saisi par toute personne intéressée, le juge des référés peut, à tout moment, au vu d’un élément nouveau, modifier les mesures qu’il avait ordonnées ou y mettre fin.  » ; que la seule circonstance que les éléments produits par une partie auraient déjà été à sa disposition lors de l’instruction de la demande de suspension et qu’ils n’auraient pas été invoqués en temps utile ne fait pas obstacle à ce qu’ils soient invoqués au soutien d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-4 du code de justice administrative tendant à ce que le juge des référés mette fin à la suspension ordonnée antérieurement ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 112-2 du code de la voirie routière :  » La publication d’un plan d’alignement attribue de plein droit à la collectivité propriétaire de la voie publique le sol des propriétés non bâties dans les limites qu’il détermine. / (…) Lors du transfert de propriété, l’indemnité est, à défaut d’accord amiable, fixée et payée comme en matière d’expropriation  » ;

Considérant qu’il résulte de ces dernières dispositions que la publication d’un plan d’alignement a pour effet d’incorporer définitivement dans le domaine public, comme élément de la voirie communale, le sol des propriétés non bâties dans les limites qu’il détermine ; qu’en conséquence, compte tenu de l’inaliénabilité du domaine public, le plan d’alignement a épuisé ses effets lors de la prise de possession par la collectivité publique des biens consignés sur ce plan ; que, par suite, la mesure de suspension d’un plan d’alignement que le juge des référés peut prononcer sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative fait obstacle à la prise de possession des biens par la collectivité publique ; que toutefois si cette prise de possession est intervenue antérieurement à la mesure de suspension prononcée par le juge des référés, la personne publique est fondée à le saisir sur le fondement de l’article L. 521-4 du code de justice administrative en lui soumettant les éléments qui n’avaient pas été produits lors de l’instruction de la demande de suspension et établissant qu’elle était entrée en possession de ces biens dans les conditions prévues par l’article L. 112-2 du code de la voirie routière ; que, dans cette hypothèse, le juge des référés doit mettre fin à la mesure de suspension de ce plan qui avait épuisé ses effets à la date où il avait statué ;

Considérant que le juge des référés, après avoir relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, que la commune de Colmar produisait des attestations du trésorier principal ainsi que des certificats d’inscription au livre foncier confirmant qu’elle avait procédé au plus tard le 17 mars 2011 au paiement ou à la consignation des indemnités dues à l’intégralité des propriétaires fonciers concernés par le plan d’alignement, n’a pas commis d’erreur de droit en déduisant de ces constatations, de manière suffisamment motivée, que le plan d’alignement avait épuisé ses effets à cette date et qu’il y avait lieu de mettre fin à la mesure de suspension prononcée postérieurement le 13 mai 2011 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Colmar qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :
————–

Article 1er : Le pourvoi de l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR, de M. B, M. et Mme A, M. D et M. et Mme C est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Colmar présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION DES HABITANTS DES QUARTIERS SUD ET MARAICHERS DE COLMAR, à M. Claude B, à M. et Mme A, à M. André Noël D, à M. et Mme Jean-Pierre C et à la commune de Colmar.
Copie en sera adressée, pour information, au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration.

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