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Urbanisme : un McDo n’est pas un « complément administratif » au sens du PLU s’il est fréquenté par les salariés !

CAA de DOUAI 

N° 16DA00762    
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. Yeznikian, président
M. Xavier Fabre, rapporteur
Mme Fort-Besnard, rapporteur public
SCP D’AVOCATS THEMES, avocat

lecture du jeudi 17 mai 2018

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat mixte ternois et la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois ont demandé au tribunal administratif de Lille d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 21 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Pol-sur-Ternoise a délivré à la société Mc Donald’s France un permis de construire pour un restaurant d’une surface de plancher de 382,16 m² sur un terrain situé rue de Béthune sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 1402727 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 avril 2016, la société par actions simplifiée à associé unique (SASU) Mc Donald’s France, représentée par la SELARL Reinhart Marville Torre, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de première instance du syndicat mixte ternois et de la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois ;

3°) de mettre à leur charge la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,
– les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,
– et les observations de Me C…B…, représentant la société Mc Donald’s France, de Me D…A…, représentant la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois et le Syndicat mixte Ternois, et de Me F…E…, représentant la commune de Saint-Pol-sur-Ternoise.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement :

1. Aux termes de l’article R. 741-7 du code de justice administrative :  » Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d’audience « .

2. Il ressort de la minute du jugement produite avec les pièces du dossier de première instance que cette décision a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier. Elle est ainsi conforme aux prescriptions de l’article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l’ampliation du jugement qui a été adressée à la société Mc Donald’s France ne comporte pas ces signature est sans incidence sur la régularité de celui-ci.

3. Par le jugement contesté, le tribunal administratif de Lille a, notamment, statué sur la fin de non-recevoir opposée en première instance tirée de l’absence d’intérêt à agir et a exposé de façon suffisamment précise les motifs pour lesquels il estimait que cette fin de non-recevoir devait être écartée. Par suite, le jugement est suffisamment motivé.

4. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que la société requérante n’est pas fondée à soutenir que le jugement contesté serait irrégulier.

Sur la recevabilité de la requête de première instance :

En ce qui concerne l’intérêt à agir de la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois :

5. Il ressort de ses statuts, que la communauté des communes Les vertes collines du Saint-Polois exerce, au titre de ses compétences obligatoires, notamment le développement économique, et en particulier la création, l’aménagement, la gestion et l’entretien des zones d’activités industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire d’intérêt communautaire. Par ailleurs, par une délibération du 8 mars 2013, le conseil communautaire de la communauté de communes a décidé  » de reconnaître le périmètre de zone situé route d’Ostreville à Saint-Pol-sur-Ternoise et figurant au POS en zone 20 NA comme constituant une nouvelle zone d’activités, respectant ainsi l’intérêt communautaire défini aux compétences de l’action économique de la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois « .

6. Il résulte du point précédent que la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois a notamment la charge de la zone d’activités sur laquelle le projet d’implantation du bâtiment destiné à l’accueil d’un établissement de restauration rapide à l’enseigne Mac Donald’s est prévu. A ce titre, elle a intérêt, pour assurer ses missions, à faire respecter les caractéristiques de la zone dont elle a la charge notamment au regard de celles figurant à l’article 20 NA du plan d’occupation des sols, lequel prévoit en particulier qu’elle est destinée à une urbanisation future pour des activités artisanales et industrielles. La communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois justifie ainsi au regard des préoccupations d’urbanisme d’un intérêt à agir suffisamment direct et certain contre l’arrêté en litige. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée sur ce point à la demande de première instance par la société appelante doit être écartée.

En ce qui concerne l’intérêt à agir du syndicat mixte ternois :

7. Le syndicat mixte ternois, qui assure la collecte, le tri et le traitement de déchets, est propriétaire d’une vaste parcelle située route d’Ostreville, sur le territoire de la commune de Saint-Pol-sur-Ternoise, sur laquelle une déchetterie est installée. Il est constant que la parcelle appartenant au syndicat mixte est contiguë à celle sur laquelle il est projeté de construire le bâtiment devant abriter un restaurant Mc Donald’s et qu’aucun obstacle, notamment visuel, n’existe entre les divers bâtiments implantés ou susceptibles de l’être, sur les parcelles en cause. Compte tenu de la configuration des lieux et également du risque d’incidence sur les possibilités de construire sur le terrain où est en particulier implantée une déchetterie, le syndicat mixte ternois, du fait de sa qualité de voisin immédiat, a un intérêt à agir suffisamment direct et certain contre l’arrêté contesté. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée sur ce point à la demande de première instance par la société appelante doit être écartée.

Sur la légalité de l’arrêté du 21 mars 2014 :

8. D’une part, le plan d’occupation des sols prévoit que la zone 20 NA,  » partiellement équipée « ,  » est destinée à une urbanisation future pour des activités artisanales et industrielles (…) « . Par ailleurs, l’article 20 NA 1 – Types d’occupation ou d’utilisation des sols autorisés – dispose que :  » Par anticipation sur l’urbanisation future et dans la mesure où le financement de tous les équipements nécessaires à réaliser est assuré : / Les établissements à usage d’activités comportant des installations classées ou non en application de la législation en vigueur dans la mesure où, compte tenu des prescriptions techniques imposées pour pallier les inconvénients qu’ils présentent habituellement, il ne subsistera plus pour leur voisinage de risques graves tels qu’en matière d’explosion, d’émanations nocives ou malodorantes ou de fumées importantes. / (…) « . Enfin, selon l’article 20 NA 2 – Types d’occupation ou d’utilisation des sols interdits :  » Tous les modes d’occupation et d’utilisation des sols ne répondant pas aux dispositions de l’article 20 NA 1 « .

9. La zone 20 NA est destinée à accueillir des activités artisanales ou industrielles. Le restaurant Mc Donald’s pour lequel le permis de construire a été sollicité ne relève ni de l’une, ni de l’autre de ces activité autorisées sur la zone mais d’une activité purement commerciale. Si l’article 20 NA 1 fait uniquement mention des  » établissements à usage d’activité « , sans autre précision, il doit être lu au regard des dispositions plus générales de l’article 20 NA dont il n’est pas dissociable et auquel il ne déroge pas. Par ailleurs, la possibilité d’une urbanisation par anticipation de la zone sous certaines conditions, prévue par ce même article, ne permet pas d’autoriser par elle-même des activités autres que celles définies par le règlement relatif aux caractères de la zone.

10. D’autre part, les articles 1 et 2 – Constructions admises ou interdites – de la  » section II  »  » Modalités d’application concernant diverses dispositions de certains articles des règlements de zone  » des dispositions générales du plan d’occupation des sols prévoient, à propos des installations annexes liées aux établissements à usage d’activités (C), que :  » Lorsqu’un règlement de zone autorise des établissements à usage d’activités comportant ou non des installations classées, sont automatiquement admises sans qu’il en soit nommément fait mention, à moins que le chapeau de zone (dit  » caractère de la zone « ) précise que les dispositions du présent paragraphe ne sont pas applicables dans la zone considérée. Les constructions à usage d’entrepôts, de bureaux, de commerces qui constituent le complément administratif, technique ou commercial de ces établissements, ainsi que celles abritant les équipements liés à leur bon fonctionnement, telles que cantines, salles de jeux et de sports, de soins (…) « .

11. La construction projetée est autonome de tout autre bâtiment à usage d’activités déjà installé dans la zone dont elle ne constitue pas une annexe. Alors même qu’il n’existerait pas ou peu de  » cantines  » dans la zone, le bâtiment envisagé destiné à accueillir une enseigne de restauration rapide ne saurait être regardé, en dépit de son éventuelle fréquentation par les personnels des établissements déjà implantés dans la zone d’activités, comme une  » cantine  » dès lors notamment que son usage n’est pas réservé à ces personnels et que cette construction autonome ne constitue pas  » un équipement lié au bon fonctionnement des établissements à usage d’activités  » au sens et pour l’application des dispositions citées au point précédent du plan d’occupation des sols. Par suite, la construction projetée ne pouvait être autorisée au regard des dispositions précitées du plan d’occupation des sols.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Mc Donald’s France n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé le permis de construire en litige.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions présentées par la SASU Mac Donald’s France sur leur fondement. Il en va de même pour celles de la commune de Saint-Pol-sur-Ternoise qui a été seulement appelée à produire ses observations dans cette instance.

14. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SASU Mc Donald’s France la somme globale de 1 500 euros à verser au syndicat mixte ternois et à la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Mc Donald’s France est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Pol-sur-Ternoise présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La société Mc Donald’s France versera au syndicat mixte ternois et à la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Mc Donald’s France, à la commune de Saint-Pol-sur-Ternoise, au syndicat mixte ternois et à la communauté de communes Les vertes collines du Saint-Polois.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais et, en application de l’article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Béthune.
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N°16DA00762

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