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Au sens de l’Art. R600-1 CU un PIG n’est pas un document d’urbanisme

Conseil d’État

N° 309096   
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
7ème et 2ème sous-sections réunies
M. Daël, président
M. Francis Girault, rapporteur
M. Boulouis Nicolas, commissaire du gouvernement
SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; RICARD, avocats

lecture du mercredi 18 novembre 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 4 décembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS, représentée par son maire ; la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 5 juillet 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Lyon a, à la demande de la communauté de communes du Sénonais, annulé le jugement du tribunal administratif de Dijon du 17 février 2004, qui a annulé l’arrêté du 6 mai 2003 par lequel le préfet du département de l’Yonne a qualifié de projet d’intérêt général les travaux de reconstruction de la station d’épuration et d’installation d’une unité d’incinération des boues d’épuration ;

2°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Sénonais une somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, enregistrée le 13 octobre 2009, la note en délibéré présentée pour la communauté de communes du Sénonais ;

Vu le code de l’urbanisme alors en vigueur ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,

– les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS et de Me Ricard, avocat de la communauté de communes du Sénonais,

– les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS et à Me Ricard, avocat de la communauté de communes du Sénonais ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par arrêté du 6 mai 2003, le préfet du département de l’Yonne a qualifié de projet d’intérêt général les travaux de reconstruction de la station d’épuration et d’installation d’une usine d’incinération des boues d’épuration issues de cette station sur le territoire de la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS ; que, sur demande de la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS, le tribunal administratif de Dijon a, par jugement du 17 février 2004, annulé cet arrêté du 6 mai 2003 ; que, saisie en appel par la communauté de communes du Sénonais, la cour administrative d’appel de Lyon a annulé ce jugement et rejeté la demande de la commune par un arrêt du 5 juillet 2007 ; que la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur, auquel renvoie l’article R. 411-7 du code de justice administrative : En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un document d’urbanisme ou d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et, s’il y a lieu, au titulaire de l’autorisation (…) ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 121-3 du code de l’urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : Peut constituer un projet d’intérêt général au sens de l’article L. 121-9 tout projet d’ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d’utilité publique et répondant aux conditions suivantes:/ 1° Etre destiné à la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’équipement, au fonctionnement d’un service public, à l’accueil et au logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes, à la protection du patrimoine naturel ou culturel, à la prévention des risques, à la mise en valeur des ressources naturelles ou à l’aménagement agricole et rural ; /2° Avoir fait l’objet : / a) Soit d’une délibération ou d’une décision d’une personne ayant la capacité d’exproprier, arrêtant le principe et les conditions de réalisation du projet, et mise à la disposition du public ; / b) Soit d’une inscription dans un des documents de planification prévus par les lois et règlements, approuvé par l’autorité compétente et ayant fait l’objet d’une publication./ Les projets relevant de l’initiative des communes ou de leurs groupements compétents pour élaborer un document d’urbanisme ou des communes membres de ces groupements ne peuvent être qualifiés de projets d’intérêt général pour l’application de l’article R. 121-4. ; qu’enfin, aux termes de l’article R. 121-4 du même code dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée devant les juges du fond : Le projet mentionné à l’article R. 121-3 est qualifié de projet d’intérêt général par arrêté préfectoral en vue de sa prise en compte dans un document d’urbanisme. Cet arrêté est notifié à la personne publique qui élabore le document d’urbanisme. Pour l’application de l’article L. 123-14, le préfet précise les incidences du projet sur le document … ; qu’il résulte de ces dispositions qu’un projet d’intérêt général doit être inscrit dans le document d’urbanisme de la commune concernée par modification ou révision ; qu’il n’est donc pas en lui-même un document d’urbanisme de la commune, mais un projet devant conduire à la révision ou la modification du document existant ; qu’il ne s’agit pas également d’une décision relative à l’utilisation ou l’occupation des sols ; que la cour administrative d’appel de Lyon, en jugeant qu’une décision qualifiant un projet de travaux de projet d’intérêt général est une décision relative à l’occupation ou l’utilisation des sols pour l’application de l’article R 600-1 du code de l’urbanisme, a ainsi commis une erreur de droit ; que, dès lors, l’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 5 juillet 2007 doit être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer opposées par le ministre de l’écologie et du développement durable :

Considérant que si le ministre soutient que la requête est devenue sans objet, la communauté de communes du Sénonais ayant abandonné le projet d’installation d’une unité d’incinération de boues et la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS ayant modifié son plan d’occupation des sols et délivré un permis de construire pour l’extension et la mise aux normes de la station d’épuration, cette circonstance ne prive pas d’objet le litige en cours ; que, par suite, les conclusions de non-lieu à statuer opposées par le ministre doivent être rejetées ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si, à l’appui de son appel, la communauté de communes du Sénonais soutient que la minute du jugement ne comporte pas la signature du rapporteur et de la greffière, le moyen manque en fait ; que si la communauté de communes soutient que sa note en délibéré en date du 21 janvier 2004 n’aurait pas été prise en considération par les premiers juges, et qu’ainsi le jugement du tribunal administratif de Dijon du 17 février 2004 serait entaché d’irrégularité, ce moyen doit également être écarté, le visa de cette note en délibéré par le jugement du tribunal administratif de Dijon établissant que les premiers juges l’ont effectivement prise en considération ;

Sur la fin de non recevoir :

Considérant, comme il a été dit, que l’arrêté du 6 mai 2003 par lequel le préfet du département de l’Yonne a qualifié de projet d’intérêt général les travaux de reconstruction de la station d’épuration et d’installation d’une unité d’incinération des boues d’épuration ne constitue ni un document d’urbanisme ni une décision d’utilisation ou d’occupation du sol ; que, par suite le moyen tiré de l’absence de notification par la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS à l’auteur de la décision et à la communauté de communes concernée, en application de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme en vigueur à la date des faits, de sa demande d’annulation de l’arrêté du 6 mai 2003 doit être écarté ;

Au fond :

Considérant que la communauté de communes du Sénonais ne peut utilement soutenir que le caractère définitif du permis de construire la station d’épuration projetée sur le territoire de la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS faisait obstacle à ce que les premiers juges examinent au regard des dispositions législatives du code de l’environnement auxquelles la réalisation de ces équipements est soumise la légalité de l’arrêté préfectoral du 6 mai 2003 qualifiant de projet d’intérêt général les travaux de reconstruction de cette station d’épuration et l’installation d’une usine d’incinération des boues d’épuration issues de la station ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la communauté de communes du Sénonais n’est pas fondée à demander l’annulation du jugement attaqué ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la communauté de communes du Sénonais la somme que demande celle-ci au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté de communes du Sénonais la somme de 3 500 euros que demande la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 5 juillet 2007 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la communauté de communes du Sénonais devant la cour administrative d’appel de Lyon est rejetée.
Article 3 : La communauté de communes du Sénonais versera à la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la communauté de communes du Sénonais tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SAINT-DENIS-LES-SENS, à la communauté de communes du Sénonais et au ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.


Abstrats : 54-01 PROCÉDURE. INTRODUCTION DE L’INSTANCE. – OBLIGATION DE NOTIFICATION D’UN RECOURS DIRIGÉ CONTRE UN DOCUMENT D’URBANISME OU UNE DÉCISION RELATIVE À L’OCCUPATION OU À L’UTILISATION DU SOL (ART. R. 600-1 DU CODE DE L’URBANISME, DANS SA VERSION ANTÉRIEURE AU 1ER OCTOBRE 2007) – CHAMP D’APPLICATION – PROJET D’INTÉRÊT GÉNÉRAL (ART. R. 121-3 ET R. 121-4 DU CODE DE L’URBANISME) – EXCLUSION.
68-06-01-04 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. INTRODUCTION DE L’INSTANCE. OBLIGATION DE NOTIFICATION DU RECOURS. – OBLIGATION DE NOTIFICATION D’UN RECOURS DIRIGÉ CONTRE UN DOCUMENT D’URBANISME OU UNE DÉCISION RELATIVE À L’OCCUPATION OU À L’UTILISATION DU SOL (ART. R. 600-1 DU CODE DE L’URBANISME, DANS SA VERSION ANTÉRIEURE AU 1ER OCTOBRE 2007) – CHAMP D’APPLICATION – PROJET D’INTÉRÊT GÉNÉRAL (ART. R. 121-3 ET R. 121-4 DU CODE DE L’URBANISME) – EXCLUSION.

Résumé : 54-01 Il résulte des dispositions des articles R. 121-3 et R. 121-4 du code de l’urbanisme, dans leur rédaction alors applicable, qu’un projet qualifié de projet d’intérêt général par le préfet doit être inscrit dans le document d’urbanisme de la commune concernée par modification ou révision. Il n’est donc pas en lui-même un document d’urbanisme de la commune, mais un projet devant conduire à la révision ou la modification du document existant. Il ne s’agit pas non plus d’une décision relative à l’utilisation ou l’occupation des sols. Une décision qualifiant un projet de travaux de projet d’intérêt général n’est donc pas une décision relative à l’occupation ou l’utilisation des sols pour l’application de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2007.
68-06-01-04 Il résulte des dispositions des articles R. 121-3 et R. 121-4 du code de l’urbanisme, dans leur rédaction alors applicable, qu’un projet qualifié de projet d’intérêt général par le préfet doit être inscrit dans le document d’urbanisme de la commune concernée par modification ou révision. Il n’est donc pas en lui-même un document d’urbanisme de la commune, mais un projet devant conduire à la révision ou la modification du document existant. Il ne s’agit pas non plus d’une décision relative à l’utilisation ou l’occupation des sols. Une décision qualifiant un projet de travaux de projet d’intérêt général n’est donc pas une décision relative à l’occupation ou l’utilisation des sols pour l’application de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2007.

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