Vu la procédure suivante :
1° Sous le n° 437810, la commune du Grau-du-Roi a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties mises à sa charge à raison des installations du port de plaisance de Port-Camargue au titre des années 2015 et 2016. Par un jugement n° 1703667 du 22 novembre 2019, ce tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés le 21 janvier 2020, le 24 août 2020, le 18 octobre 2021 et le 13 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune du Grau-du-Roi demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler ce jugement ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 6 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code général des impôts ;
– le code général de la propriété des personnes publiques ;
– le code des transports ;
– la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, notamment son article 37 ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Vincent Mazauric, conseiller d’Etat,
– les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la commune du Grau-du-Roi ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 avril 2022, présentée par la commune du Grau-du-Roi ;
Considérant ce qui suit :
1. Les deux pourvois, qui concernent les mêmes biens et la même imposition, présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune du Grau-du-Roi est la gestionnaire des installations du port de plaisance de Port-Camargue, mis à sa disposition par l’Etat aux termes d’un arrêté préfectoral du 4 janvier 1984. Le port de plaisance de Port-Camargue se compose d’une partie ouverte au public ainsi que de propriétés privées appelées « marinas ». Des postes d’amarrage sont disponibles dans les deux parties du port. La commune est assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des installations du port. Par un jugement du 22 novembre 2019, le tribunal administratif a rejeté la demande de la commune de décharge totale des impositions au titre des années 2015 et de 2016 et, par un jugement du 2 juillet 2020, sa demande identique relative aux impositions au titre de l’année 2017. La commune se pourvoit en cassation contre ces deux jugements.
3. Aux termes de l’article 1380 du code général des impôts : « La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l’exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code. » Aux termes de l’article 1400 du même code : « Sous réserve des dispositions des articles 1403 et 1404, toute propriété, bâtie ou non bâtie, doit être imposée au nom du propriétaire actuel. » Aux termes de l’article 1501 du même code, qui figure à la section de ce code relative aux règles d’évaluation de la valeur locative des biens imposables aux impositions communales : « […] III. – La valeur locative des postes d’amarrage dans les ports de plaisance à la date de la révision est fixée selon le tarif suivant : 110 ? pour les ports maritimes de la Méditerranée ; 80 ? pour les autres ports maritimes ; 55 ? pour les ports non maritimes. / Pour chaque port, ce tarif peut être, après avis des commissions communales et intercommunales des impôts directs prévues aux articles 1650 et 1650 A, minoré ou majoré de 20 % ou 40 % en fonction du nombre de services et d’équipements offerts, pondéré par la capacité moyenne d’accueil d’un poste d’amarrage. Les modalités d’application de cette modulation sont fixées par décret en Conseil d’Etat. »
4. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de l’article 37 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 dont sont issues les dispositions citées au III de l’article 1501 du code général des impôts, que le législateur a entendu que la valeur locative de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle sont assujetties les installations des ports de plaisance situées sur le domaine public maritime soit établie en fonction du seul nombre de postes d’amarrage du port, multiplié par un tarif déterminé selon la situation géographique du port de plaisance concerné et les services et équipements qu’il offre aux usagers.
5. Il résulte de ce qui précède que c’est sans erreur de droit ni dénaturation que le tribunal administratif, qui ne s’est pas mépris sur la nature des installations assujetties, a jugé inopérants les moyens soulevés par la commune du Grau-du-Roi et tirés de ce que certains postes d’amarrage ne seraient pas des propriétés bâties ou ne seraient pas une propriété publique. Les pourvois de la commune doivent par suite être rejetés, y compris leurs conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Décide :
Article 1er : Les pourvois de la commune du Grau-du-Roi sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune du Grau-du-Roi et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.